Vivre avec un malentendant, ou l’apprentissage de la patience – 1ère partie

couple taliesin

Ce n’est pas toujours facile d’être malentendant.

Ca peut être lourd, fatigant, déprimant.

Mais ce n’est pas évident non plus d’être dans l’entourage immédiat d’un malentendant. Le conjoint, en particulier, doit aussi affronter et gérer ce handicap.

C’est aussi le cas des enfants, parents, colocataires ou autres personnes qui vivent au quotidien avec la personne malentendante. Je parlerai avant tout du rôle du conjoint dans cette petite série de deux articles, mais ce que j’évoque peut être transposé sans difficulté à toute personne très proche du malentendant.

Il y a plusieurs raisons à ces difficultés :

  • Les efforts constants à faire pour se faire comprendre

Parler comme il faut, attirer l’attention avant de parler, ne pas cacher sa bouche, se mettre bien en face, et en général être conscient à tout moment que l’autre entend mal.

Il faut y penser à chaque fois que l’on essaie de communiquer, que l’on soit seuls ou en groupe, à la maison ou dehors.

Mais des fois, on oublie. On parle en tournant le dos, en faisant la vaisselle ou depuis une autre pièce. Et il faut répéter. Et répéter encore.

Et puis, des fois, la personne malentendante oublie aussi qu’elle entend mal, et pose une question à l’autre qui est à l’autre bout de la maison, sans se rendre compte (jusqu’à ce que ce soit trop tard) qu’elle ne pourra pas entendre sa réponse. Et ça donne quelque chose comme :

– Dis, t’as mis où le papier du loyer ?
– Sur la table du salon (l’autre personne répond depuis là où elle est)
– Ah je t’entends pas…

Ben oui, forcément !

Et il y a les jours où on est tellement fatigué ou préoccupé que c’est trop difficile de parler fort et clairement, de faire attention, de penser à tout. Et il faut répéter chaque phrase, au moment où on a le moins d’énergie pour le faire. Alors on s’énerve. On sait très bien que ce n’est pas de la faute de la personne si elle entend mal. Mais chaque effort demande tellement d’énergie que la frustration fait surface malgré tout.

Et comme par hasard, ce sont souvent à ces moments-là que l’autre, fatigué lui aussi, entend encore moins bien, et fait répéter encore plus.

  • Les disputes inutiles

J’ai remarqué qu’une partie non-négligeable des disputes qui peuvent se produire dans mon foyer ont un point d’origine commun : j’ai mal compris quelque chose.

Il suffit que je loupe un mot, ou le sens d’une phrase, et je vais répondre d’une certaine façon. Ma réponse ne correspond pas aux attentes de l’autre et, pour peu que j’aie parlé avec conviction et que ma réponse soit vraisemblable, l’autre peut mal le prendre, et là, ça dégénère.

De même si ce que j’ai (mal) compris m’énerve directement.

Genre :

– Ah quand même, t’exagères, de dire ça ! C’est pas vrai !
– Mais,… comment ça ?
– Euh, mais alors, qu’est-ce que t’as dit, en fait ?

Et ça, c’est si par chance ma réaction est vraiment incompréhensible pour l’autre par rapport à ce qui avait été dit à la base.

Parce qu’il arrive qu’on parte dans une dispute, pour se rendre compte une demi heure plus tard qu’elle n’avait absolument pas lieu d’être parce qu’on était tout à fait d’accord, en fait.

C’est épuisant.

Pour l’autre, et pour moi.

J’ai aussi vu des couples où la dispute éclate parce que la personne malentendante a manqué une information primordiale à un moment donné.

– Pourquoi tu ne m’as pas dit que les Untel venaient manger demain ?
– Mais je te l’ai dit ! Hier midi, après leur coup de fil !
– Mais non, tu me l’as pas dit ! Ou alors j’avais pas compris ça, moi !

C’est la faute à qui ? Au malentendant, de ne pas avoir dit qu’il n’avait pas compris ce qui avait été dit ? Il y a de fortes chances qu’il ne s’en soit même pas rendu compte.

Au conjoint entendant, de ne pas s’être assuré que la personne malentendante avait tout bien compris de son message ? Pas si évident.

Bien sûr, et heureusement, on peut mettre des choses en place pour éviter, ou diminuer la fréquence de ces moments difficiles. Mettre les rendez-vous importants par écrit, noter les choses, vérifier la compréhension de l’autre, etc. Mais cela ne résout pas toujours tout, et on n’atteint pas un degré de zénitude extrême du jour au lendemain.

La semaine prochaine je parlerai de plusieurs autres rôles que le conjoint peut être amené à jouer, avec ce qui peut déraper, et comment garder son indépendance autant que possible.

A la pêche aux idées…

fishing-656373_1280

Le début de cette semaine était brumeux. Un brouillard dense, blanchâtre et opaque, qui empêchait toute visibilité et rendait la respiration difficile.

Et tandis que je réfléchissais au thème à aborder cette semaine, dans ce blog, j’ai eu l’impression que le brouillard avait envahi jusqu’à mon cerveau. Mes méninges en surchauffe n’arrivaient à se fixer sur aucune idée pertinente. Et malgré les nombreuses possibilités (j’ai plusieurs listes !), aucun thème ne retenait mon attention.

Alors je me suis dit :

Il est peut-être temps sortir de mes idées, de m’ouvrir, et de vous demander à vous, mes lecteurs, ce que vous souhaitez lire !

Quels sont les thèmes que vous aimeriez que j’aborde ?

Quelles sont les difficultés que vous rencontrez ?

Connaissez-vous une personne sourde ou malentendante (ou autrement handicapée) qui vous inspire, et dont vous aimeriez que je parle ?

Un livre ou un film que vous aimeriez que je chronique ?

Une technologie que vous aimeriez que j’évoque ?

Une ou des émotions que vous devez affronter ?

Souhaitez-vous que je traite plus en profondeur un thème que j’ai déjà évoqué ?

C’est l’occasion de me faire passer vos suggestions, et de contribuer à mon blog !

Vous pouvez me répondre en commentant sur cet article, ou en m’envoyant un email sur ma page de contact. Je répondrai à toutes les suggestions autant que possible.

Communiquer en groupe : l’enfer, c’est les autres ?

startup-594090_1280

 

« Tu viens demain ? »

Une petite question anodine, posée par un ami rencontré par hasard dans la rue. Une petite question qui déclenche chez moi de nombreuses interrogations et émotions, qu’il me faut gérer avant de pouvoir y répondre.

Qu’il s’agisse d’une rencontre avec des amis dans un café, d’une soirée prévue chez quelqu’un, ou même peut-être d’un repas, cela ne change pas grand chose.

Est-ce que je vais arriver à comprendre ?

Est-ce que je vais avoir l’énergie et la concentration de suivre ce qui est dit ?

Est-ce que ça vaut le coup d’y aller ?

Est-ce que je ne vais pas rentrer déprimée, me sentant exclue et seule ?

Aurai-je l’impression d’avoir perdu mon temps ?

Et toutes ces questions tournent en quelques secondes dans mon esprit surchauffé, jusqu’à ce que je parvienne à répondre, en général « oui » parce que malgré tout, je n’aime pas abandonner avant d’avoir essayé.

Mais une fois arrivée sur le lieu de rencontre en question, c’est un véritable parcours du combattant qui commence.

  • Le bruit

C’est la première chose.

Parce qu’une rencontre avec plusieurs personnes, c’est bruyant. Même si on se retrouve chez quelqu’un, que l’ambiance est calme et qu’il n’y a pas de musique en arrière-plan. Il suffit que l’on démarre une conversation où tout le monde s’enthousiasme, rit ou se passionne, pour que le niveau de décibels augmente.

Alors si en plus, on se retrouve dans un café, dans un restaurant, que la musique est forte ou simplement qu’il y a du bruit, alors cela complique drôlement la compréhension pour moi.

  • Les conversations croisées

Qui dit groupe de personnes dit des conversations qui s’entrechoquent, se croisent et se développent en parallèle.

Le brouhaha du groupe devient complètement incompréhensible, et même anxiogène, si je me retrouve prise au milieu de plusieurs conversations. A part m’extraire du groupe et me déplacer pour pouvoir tenter de suivre une seule conversation, ou converser avec une seule personne, je n’ai pas beaucoup d’options.

  • La lecture sur les lèvres est difficile

L’environnement est souvent trop sombre, mal éclairé, ou avec des contre-jours qui sont autant d’obstacles à la lecture labiale. Et s’il y a plusieurs personnes, elles ne pourront pas toutes être bien placées pour que je puisse voir leur visage et leurs lèvres.

Or, les mouvements des lèvres et du visage de l’interlocuteur sont une composante essentielle de la compréhension de la parole pour moi.

  • Les personnes sont trop éloignées

Quand on est en groupe, que l’on soit assis autour d’une table, debout dans une salle ou sur des canapés autour de tables basses, il y aura toujours une ou plusieurs personnes qui seront trop éloignées de moi, ou trop mal placées par rapport à moi pour que je comprenne ce qu’elles disent.

Il y aura aussi toujours des personnes qui parleront trop doucement, trop vite, ou pas assez clairement pour que je puisse suivre ce qu’elles disent, même si elles sont à côté de moi.

  • Qui parle ?

Dans une conversation naturelle à plusieurs, les gens s’interpellent, s’interrompent et les paroles fusent de l’un à l’autre. Et moi, j’ai du mal à savoir qui parle. Ou de quoi on parle, d’ailleurs.

Si je me concentre très fort sur une personne proche de moi, qui parle assez distinctement et dont je peux voir le visage, j’arrive à comprendre presque tout ce qu’elle dit. Mais si le sujet de la conversation n’est pas répété, eh bien, j’aurai compris l’opinion de cette personne sur… un sujet inconnu.

Les moments où je suis au milieu d’un groupe sont ceux où j’ai le plus conscience de mon isolement. Et quelquefois, c’est vraiment douloureux. Mais la plupart du temps, je parviens à faire en sorte que l’expérience en vaille le coup.

Comment ?

Alors déjà, j’évite les lieux bruyants autant que possible. Si je sais que la soirée est dans une salle de concert, qu’il va y avoir de la musique, ou que le lieu va être très bruyant pour une raison ou pour une autre, j’y réfléchis à deux fois avant d’y aller. Si mon objectif est de voir un concert, alors je m’arme de mes bouchons d’oreille et j’y vais. Et tant pis si je ne peux pas trop communiquer. Mais si l’objectif est de voir les gens et de leur parler, alors je sais que ce n’est pas la peine.

Ensuite, une fois sur place, je me rapproche physiquement des gens avec qui j’entame une conversation. C’est plus facile s’il s’agit d’un lieu où l’on peut circuler librement. Dans le cas où on est assis autour d’une table, j’aurai tendance à parler avec mes voisins directs uniquement (d’où l’importance de bien les choisir !).

Si je peux, je parle de mon problème d’audition. Cela peut se faire sous la forme d’un « J’ai décroché, là. Vous parlez de quoi ? » lancé à la cantonade. C’est ce que je ferai si je suis avec un groupe d’amis qui me connaissent et sont au courant de mon handicap.

Je peux aussi simplement expliquer à la personne avec qui je parle que je suis malentendante et que j’ai besoin qu’elle parle clairement et en me regardant pour que je la comprenne.

Si c’est possible, je privilégie la conversation avec une personne à la fois.

J’ai remarqué que du coup, j’ai tendance à avoir des conversations profondes et relativement intimes. Cela me demande tellement de concentration de suivre une conversation dans un environnement bruyant ou dans un groupe, qu’il faut que ça en vaille la peine ! Alors j’évite les bavardages insignifiants ou superficiels.

Et en dernier lieu, je passe par l’écrit. C’est là où c’est bien pratique d’avoir son smartphone à portée de main, avec une application de notes facile à utiliser. C’est comme si j’avais une ardoise, et le rétroéclairage permet de s’en servir même dans les lieux sombres.

Bien sûr, je n’utiliserais pas l’écrit pour mener toute une conversation avec quelqu’un que je connais peu. Mais c’est bien pratique, surtout quand l’environnement est très bruyant, de pouvoir échanger quelques mots avec mes proches de cette façon.

Au bout du compte, même si les situations de groupe restent difficiles pour moi, je m’arrange toujours pour avoir au moins une ou deux conversations significatives, qui me permettent de repartir le sourire aux lèvres, sachant que ma présence n’aura pas été totalement inutile ou invisible.

Et vous, comment gérez-vous les situations de groupe ? Comment les malentendants de votre entourage se comportent-ils en groupe ? Avez-vous trouvé des astuces qui vous aident à mieux communiquer ?

L’outil ultime du malentendant : le smartphone

Smartphone123rf

 

Quand on réfléchit aux outils qui peuvent aider un malentendant, on ne pense pas toujours aux objets courants, que tout le monde possède et utilise, ou presque. Et pourtant, le smartphone, ou téléphone intelligent, est un des outils que j’utilise au quotidien, et qui m’aide dans bien des situations en lien avec ma perte auditive.

De nombreuses raisons en font un compagnon de choix, qui ne me quitte jamais.

  • La « coolitude » de l’objet

Le smartphone est un des objets technologiques les plus répandus à l’heure actuelle. La plupart des personnes qui ont une vie sociale et professionnelle active en ont un.

Pouvoir l’utiliser pour faciliter la compréhension quand on est malentendant, c’est un des éléments qui nous projette de l’état de « personne handicapée avec prothèses auditives » à celui de « personne à la pointe du progrès technologique ».

Le côté jeune, actif, dans le vent, nous aide à nous intégrer dans un monde largement basé sur la technologie.

  • La magie de la communication écrite

La possibilité de recevoir un texto ou un email à la place d’un appel téléphonique rend la communication bien plus facile. Finis ces moments de sueur froide où je répond au téléphone et ne parviens pas à identifier la personne, ou l’organisme, qui m’appelle.

« Pourriez-vous m’envoyer un email s’il vous plaît ? J’entends très mal au téléphone. »

Et la plupart du temps, la communication arrive ainsi par écrit, le smartphone m’y donne un accès immédiat, et la compréhension du message est assurée sans effort de ma part.

Et ça, il faut bien le dire, c’est très reposant.

  • La qualité du son numérique

Les smartphones actuels de bonne qualité possèdent des composantes électroniques qui assurent un excellent son numérique.

Cela me permet de recevoir ou de passer un appel, alors qu’avec un téléphone fixe, cela n’est plus possible. Après, même avec le smartphone, il faut certaines conditions pour que je puisse comprendre une personne au téléphone, et il s’agit presque toujours de conversations courtes, avec un objectif pratique.

La période où je passais des heures au téléphone avec famille et amis, à parler de tout et de rien, est maintenant bel et bien révolue. Mais heureusement, il reste toujours d’autres moyens de communication (Dieu merci, Skype existe !).

  • L’accès à la musique (avec un bon casque)

Grâce au son numérique, j’arrive même à écouter un peu de musique ! Il me faut un bon casque, bien sûr, mais une fois le casque adéquat trouvé, le son du smartphone est assez clair pour m’aider à saisir une partie de la richesse sonore de certaines musiques.

Bien mieux que le son de ma chaîne hifi, ou le son des haut-parleurs de la voiture ou de l’ordinateur, en tout cas.

  • Et bientôt : La possibilité d’avoir des appels transcrits par écrit

Les smartphones deviennent de plus en plus pertinents pour les personnes malentendantes, grâce à la myriade d’applications que l’on peut installer dessus.

La preuve : Un entrepreneur sourd est en train de développer une application qui pourra transcrire « instantanément sur votre smartphone les propos de votre interlocuteur pendant qu’il parle. »

La technologie de transcription de la voix a beaucoup progressé ces dernières années, et une application de ce genre permettra à de nombreux malentendants de pouvoir recommencer à téléphoner sans crainte.

Je l’attends moi-même avec beaucoup d’impatience !

  • Et déjà : une télécommande pour les appareils auditifs

Depuis peu, certains appareils auditifs sont compatibles avec un smartphone. Un utilisateur a d’ailleurs détaillé les fonctionnalités de ses aides auditives qui sont couplées avec son iphone.

Bien sûr, cela ne concerne pas toutes les prothèses auditives, ni même tous les smartphones pour l’instant. Apple a été le premier à rendre son iphone compatible. Mais des applications sont en cours de développement pour les autres plateformes mobiles, et l’année 2015 devrait apporter de grandes avancées à ce sujet.

Mais pourquoi faire, me demanderez-vous peut-être ? Pourquoi coupler des aides auditives avec un smartphone ? N’est-ce pas un gadget inutile ?

Eh bien, j’ai toujours eu une télécommande avec mes appareils, depuis mon premier appareillage en 2009. Cette télécommande peut être utilisée pour augmenter ou diminuer le volume, pour augmenter ou diminuer les aigus, ou pour changer de programme.

smart control

Voici à quoi ressemble ma télécommande actuelle.

La télécommande améliore-t-elle le confort auditif ? Sans aucun doute. Mais je ne m’en sers quasiment jamais.

Pourquoi ? Je n’y pense pas. Les appareils sont dans mes oreilles et je les y oublie volontiers. Du coup, la plupart du temps, je n’ai pas le réflexe télécommande, parce que je ne pense ni à mes appareils, ni à ma perte d’audition.

Et puis, c’est voyant, de sortir une télécommande étrange de son sac pour subitement pianoter dessus. Ma télécommande actuelle émet des lumières bleues et rouges à chaque fois que je modifie un réglage, autant dire que ce n’est pas très discret.

Pianoter sur un smartphone, par contre, tout le monde le fait constamment.

Or, les appareils auditifs compatibles proposent une application à télécharger sur le téléphone, qui remplace la télécommande peu pratique des fabricants d’aides auditives. Depuis l’interface de l’application, on peut changer le volume, les aigus, les programmes, et bien d’autres fonctions encore.

  • Et même : un micro déporté à moindre coût !

Ca, c’est la cerise sur le gâteau ! Le smartphone peut devenir un micro déporté, lorsqu’il est couplé avec les appareils auditifs.

Concrètement, cela signifie que le micro du smartphone peut être utilisé pour saisir les paroles d’une personne ou d’un groupe de personne, et le son est retransmis directement dans les appareils auditifs.

En gros, au lieu de se pencher vers ses interlocuteurs, on leur passe le téléphone, et voilà ! Cela permet une amélioration non négligeable de la qualité d’écoute.

Je m’étais renseignée, il y a quelques années, sur les coûts associés aux systèmes de micros déportés, compatibles avec les aides auditives. Ils se chiffraient en milliers d’euros.

Et là, avec un smartphone à 500 euros, on a une technologie similaire qui, même si elle n’atteint peut-être pas le niveau de qualité des micros spécialisés, est accessible à bien plus de malentendants, et peut contribuer grandement à un meilleur confort d’écoute.

Une chose est sûre, mes prochains appareils auditifs seront connectés !

Perte d’audition : le ridicule ne me tuera pas

honte

 

Imaginez… Une soirée entre amis, tout le monde papote autour de la table, et la conversation se concentre sur un de vos amis, qui vient de rentrer d’un voyage autour du monde. Chacun le presse de questions, il raconte quelques anecdotes. Vous saisissez quelques mots ici et là, guère plus, mais soudain vous décidez de participer à la conversation.
– Mais alors, tu es allé au Cambodge finalement ?
Une gêne épaisse semble tomber sur l’assemblée tandis que votre ami baisse le regard, et bafouille :
– Euh, oui, c’est ce que je viens de raconter.
Et vous vous rendez compte que cela fait dix minutes qu’il ne parle que de cela.

Tout comme la blague ou le bon mot que vous sortez, fier d’avoir suivi la conversation d’assez près pour intervenir à bon escient. Mais votre femme/ami/collègue vient de dire exactement la même chose, et vous le fait remarquer.

Ou bien la conversation surréaliste avec une personne que vous venez de rencontrer :
– Et toi tu fais quoi dans la vie ?
– Ah oui, j’aime bien le rock aussi !
– Euh ah d’accord…
Une bonne âme vous répètera alors peut-être la question d’origine, vous remettant ainsi dans le droit chemin et vous couvrant de honte par la même occasion.

C’est peu dire qu’une perte d’audition vous mettra un jour ou l’autre dans une situation de ridicule. C’est quasiment inévitable, à moins de devenir totalement asocial, et d’éviter la compagnie des autres autant que possible. D’ailleurs, c’est le choix que certaines personnes célèbres, comme Beethoven, ou Jean-Jacques Rousseau, ont fait, suite à leur perte d’audition : ils se sont éloignés des autres au point d’en devenir misanthropes. Et c’est une possibilité, en effet. S’isoler. Elle est souvent tentante, à un moment ou à un autre. Ce serait tellement plus facile de ne pas avoir à faire tous ces efforts pour comprendre les autres, avec le risque de tomber à côté de la plaque malgré tout. Autant rester seul chez soi, avec ses livres, ses films et la télévision sous-titrée !

  • L’humour

Malgré tout, même quand je suis submergée par cette émotion, il arrive toujours un moment où j’ai de nouveau envie, et besoin de voir d’autres personnes, et de partager des choses. Alors je trouve des astuces pour gérer le ridicule. J’en ai trouvé une qui marche très bien : l’humour. Certes, ce n’est pas toujours facile d’avoir assez de distance pour pouvoir rire de soi. Mais quand je me sens bien, que j’assume ma perte d’audition, que j’en parle, alors j’arrive aussi à en rire. Cela détend toutes les situations, et le ridicule devient drôle, et non honteux.

  • Le détachement

Quand je n’arrive pas à me sentir assez bien pour rire de la situation, alors je tente de m’en détacher. Une grande respiration, et j’essaie de penser à quelque chose de positif. Je laisse glisser la situation embarrassante qui vient de se produire, et je lâche prise. Là encore, je n’y arrive pas toujours. Mais il arrive que non seulement je réussisse à me détacher du ridicule, mais que j’en profite même pour utiliser une autre astuce :

  • Les explications

C’est l’occasion de passer par dessus la honte et le ridicule, et d’expliquer simplement ce que ma perte d’audition signifie. Ce que je vis au quotidien, en quelque sorte. Cela permet à l’autre de mieux comprendre, et cela m’aide aussi à me sentir plus sûre de moi, et à continuer à prendre des risques conversationnels, quitte à être ridicule à l’occasion.

  • De la douceur

Astuce ultime dans ma boîte à outils : si je ne me sens pas assez bien pour rire de la situation embarrassante dans laquelle je viens de me mettre, si je n’arrive pas à m’en détacher, si je n’ai pas la force d’expliquer à l’autre ce que je ressens, et si au bout du compte je me sens juste seule, honteuse, en colère contre moi-même et mon incapacité à suivre les conversations, et victime de ce handicap complètement arbitraire et injuste, alors j’essaie d’être aussi douce que possible avec moi-même. Peut-être est-ce le moment de quitter cette soirée, de rentrer chez moi et de prendre un bon bain, ou de siroter une tisane en lisant un livre qui m’inspire et me détend. Et plus tard, quand je serai calmée, je pourrai me pardonner. Lâcher prise de ce moment.

Et je peux ensuite repartir, prête à affronter d’autres moments qui ne seront peut-être pas tous évidents à gérer. Mais pour chaque situation difficile, le risque que je prend, en étant au contact des autres malgré mon handicap, me récompense par de nombreux moments intenses de partage, de conversations profondes et intéressantes, et de rencontres enrichissantes. Et cela vaut le coup.

Et vous, comment vivez-vous ces situations ? Les sentiments de ridicule, et de honte, ne touchent pas que les malentendants, bien sûr. Avez-vous trouvé d’autres astuces pour gérer ces émotions ?

Livre : grandir avec des parents sourds quand on entend…

 

Je suis tombée par hasard sur ce livre, qui m’a été chaudement recommandé. Je m’y suis jetée à corps perdu, et je l’ai lu en quelques jours. Il se lit vite. Très vite même. Les premières lignes donnent bien le ton :

« Mes parents sont sourds.
Sourds-muets.
Moi pas. »

Et de là part une myriade de petits chapitres, longs de quelques paragraphes ou de quelques pages, remplis d’anecdotes savoureuses et d’émotions brutes. la difficulté de grandir avec des parents sourds quand on entend. L’envie de pouvoir partager les mots que l’on apprend, et que l’on aime, avec ses parents, mais l’impossibilité de le faire. La honte d’avoir des parents « différents ».

Le livre est vite lu, mais pas vite oublié. Des passages entiers restent en mémoire, comme celui où la narratrice adolescente rentre de l’école en criant « Salut, bande d’enculés ! » Et sa mère, qui n’a rien entendu, bien sûr, l’embrasse avec tendresse.

Véronique Poulain met en évidence, d’une façon crue et directe, sans tabou, mais non sans tendresse, le fossé qui sépare le monde des entendants de celui des sourds. Et son malaise, en grandissant avec une audition « normale », et se rendant compte que ses parents ne sont pas comme tout le monde, est très bien montré, tout comme la fierté qu’elle éprouve malgré tout à leur égard, et qui lui permet de terminer le livre sur une note très positive.

Cette lecture m’a fait réfléchir. L’écart entre le monde des sourds et celui des entendants est évident. Ce sont deux cultures, avec une langue, et une façon d’être bien distinctes. Mais qu’en est-il du monde des malentendants ? De ceux qui ne parlent pas la langue des signes, mais qui ne parviennent pas non plus à s’insérer parfaitement dans la culture orale sans aide ? Nous ne sommes pas complètement sourds, et surtout nous ne connaissons pas la langue des signes. Du coup, la culture sourde nous est inaccessible. Les efforts qui sont faits pour rendre la culture compréhensible aux sourds, grâce à des pièces de théâtre ou autres événements doublés en langue des signes, ne nous aident en rien. Nous sommes d’ailleurs tout aussi démunis face à un sourd signant qu’un entendant.

Et pourtant, la culture entendante ne nous est pas tout-à-fait accessible non plus. Les films, la musique, les pièces de théâtre, les conversations de groupe sont difficiles, sinon impossibles à suivre. Nous sommes entre les deux. Le fossé entre nous et ceux qui entendent bien est moins important que celui que décrit Véronique Poulain, mais il est bien là : une fissure, qui reste invisible aux yeux des autres, tout comme notre handicap. Le défi est quotidien, tandis que nous tentons tant bien que mal de trouver notre place au sein d’une société dans laquelle le son est primordial.

Nous aussi, nous sommes confrontés à cette honte d’être différent, cette peur d’être à côté, d’être en décalage, d’être ridicule. C’est souvent si tentant de s’isoler, de s’éloigner des gens, de se réfugier dans les livres, ou dans sa vie intérieure. Mais j’ai remarqué une chose : j’ai envie de me sentir vivante, de sentir que j’appartiens à l’espèce humaine, et que je ne suis pas une île, perdue au milieu d’un océan déchaîné. Et pour cela, il faut que je détermine ce qui est important pour moi, et que je parvienne à le faire, coûte que coûte et quoi qu’il en soit. Tout comme Evelyn Glennie, il suffit d’être passionné par quelque chose pour ne plus se laisser abattre. Il y aura toujours des hauts et des bas. Mais tant que les hauts dominent, tout cela en vaut bien la peine…

Et vous, avez-vous déjà trouvé une passion, ou une façon d’être qui vous aide à avancer malgré votre handicap ou d’autres difficultés ? Ou bien, avez-vous accompagné ou aidé quelqu’un dans une situation similaire ? Quelle a été votre expérience ? Quels sont les éléments qui vous font retomber, et ceux qui vous aident à aller mieux ?

Les outils qui aident : les appareils auditifs

appareils auditifs

 

Quand on perd l’audition, on trouve de nombreuses façons de s’adapter. On regarde plus. On devient plus sensible aux émotions. On observe les autres, les situations et les lieux bien plus qu’avant. On s’appuie sur les autres sens pour compenser le handicap. Et il arrive que l’on s’appuie tellement sur ses capacités qu’on en arrive à oublier qu’il existe des technologies qui peuvent nous aider, au quotidien, à mieux entendre et à mieux communiquer. Parmi les quelques outils que j’utilise au quotidien, les appareils auditifs viennent en première place.

Et les prothèses auditives, c’est toute une histoire ! Une histoire très personnelle pour chaque malentendant. Il s’agit là d’une étape décisive à franchir dans l’acceptation de sa perte auditive. Ce n’est pas évident de passer du stade « Je n’entends pas bien, pouvez-vous répéter ? » (ou même « Je fais comme si j’avais entendu, tout va bien ») à « Je suis malentendant et je suis appareillé. »

Or, il est important de se faire appareiller assez tôt. Pourquoi ? Même avec une surdité légère, le cerveau perd l’habitude de percevoir certains sons. Plus on attend, plus la perte auditive est sévère au moment de l’appareillage, et plus difficile (et long) sera le temps d’adaptation, car le cerveau doit se réhabituer à percevoir ces sons, et doit souvent réapprendre à les identifier !

Mais quel que soit le moment où vous franchissez finalement le cap, il est important de suivre certaines règles pour que tout se passe pour le mieux :

– D’abord, obtenez l’aide d’un professionnel. N’essayez pas d’acheter des appareils auditifs à 200 € ou moins sur Amazon ! Cela ne vous aidera pas beaucoup. En effet, votre surdité est unique : vous entendez moins certaines fréquences que d’autres, et le fait d’augmenter simplement le volume pour tous les sons, et toutes les fréquences, ne vous donnera pas le confort d’écoute que vous recherchez, et cela risque au contraire d’endommager un peu plus votre audition ! Un audioprothésiste saura vous conseiller, et surtout pourra régler les appareils de façon à compenser votre perte auditive particulière.

– Si vous aviez essayé des appareils il y a plusieurs années, et que cela ne vous avait pas convenu pour une raison ou pour une autre, réessayez ! La technologie a vraiment fait un bond depuis quelques années, et les problèmes qui existaient il y a 10 ans, 5 ans ou même 2 ans pourraient bien avoir disparu. Allez voir un autre audioprothésiste, peut-être, d’autant plus si ça ne s’était pas très bien passé la dernière fois. Choisissez quelqu’un qui se trouve assez près de chez vous, parce que vous lui rendrez visite très régulièrement pendant la phase de réglage des appareils, privilégiez un professionnel avec qui vous vous sentez en confiance, et demandez un essayage gratuit !

– Rappelez-vous que ce n’est pas magique. Si vous venez de sortir de chez l’audioprothésiste et que tout est trop fort, que certains sons vous gênent ou que vos appareils sifflent, ne vous inquiétez pas ! Ne jetez pas vos appareils au fond d’un tiroir pour autant. Votre cerveau doit se réhabituer au niveau sonore normal, et doit recommencer à faire le tri entre les informations sonores qu’il n’avait plus l’habitude de gérer à ce volume. Il est même possible que vous deviez réapprendre à identifier certain bruits ou sons, ainsi que leur provenance. Cela prend un peu de temps. Si au bout de quelques jours, l’écoute est toujours inconfortable, retournez voir votre audioprothésiste et apportez-lui le maximum d’indications précises sur ce qui vous gêne (« J’ai du mal avec le bruit des talons dans la rue », « je ne supporte pas quand quelqu’un siffle », etc.). De cette façon, il pourra affiner le réglage de vos appareils. Cette phase de mise au point peut durer plusieurs semaines, soyez donc patient !

– Si vous avez une surdité des deux oreilles (pour autant que chaque oreille entende au moins un peu), et même si une oreille entend mieux que l’autre, faites appareiller les deux oreilles autant que possible. Cela permet un équilibre sonore au niveau du cerveau, et le temps d’adaptation sera d’autant plus court et moins difficile si vous n’avez pas à vous battre contre une perception déséquilibrée entre les deux oreilles. Vous trouverez plus d’informations sur ce sujet ici.

Il est important de savoir que les prothèses auditives ne sont pas l’instrument merveilleux qui résoudra absolument tous vos problèmes d’audition dans toutes les situations et qui vous permettra de faire comme si vous entendiez parfaitement bien en premier lieu. Malheureusement, ce n’est pas le cas. Lorsque j’ai eu mes premiers appareils, j’ai rêvé que cela me permettrait de ne pas avoir à divulguer mon handicap (cette « faiblesse »). Tout comme une personne myope qui porte des lentilles n’a pas besoin d’en parler, je pensais pouvoir être dispensée des longues explications embarrassantes pour justifier un quiproquo ou une incompréhension. J’ai été très déçue de me rendre compte que, dans un environnement bruyant, je ne comprends toujours pas tout, et que je décroche rapidement des conversations de groupe malgré l’appareillage.

Et j’ai dû apprendre à en parler. Expliquer aux gens qui m’entourent et que je rencontre que je n’entends pas bien, et que s’ils me parlent en cachant leur bouche, ou en me tournant le dos, ou en étant à l’autre bout de la pièce, ou s’il y a beaucoup de bruit, je ne les comprendrai pas, même avec mes prothèses auditives. Et au fur et à mesure que j’assume mieux ma perte auditive, je me rends compte que je dois quand même beaucoup à mes appareils. Certaines conversations me sont maintenant accessibles, et même si la situation est difficile à cause du vacarme environnant, ce sont des conversations dont j’aurais été exclues dès le départ avant d’être appareillée. Les conversations en tête à tête sont aussi bien plus confortables. Plus besoin de tendre l’oreille et de faire un effort de concentration aussi intense pour comprendre mon interlocuteur. Pour moi, les appareils représentent le confort auditif que je ne pourrais pas avoir sans. Et à chaque fois qu’il est temps d’en changer, la technologie a tellement évolué qu’elle me permet un confort encore plus important, même si ma perte auditive s’est accentuée. 

Alors j’apprends à vivre avec, avec le rituel de les sortir de leur petit boîtier chauffant le matin, et de les y remettre le soir, qui est devenu presque aussi automatique que le brossage de dent quotidien. Et je suis très reconnaissante que ces petits objets puissent avoir un si grand impact dans ma vie, même s’ils ne « corrigent » pas ma perte auditive.

Et vous ? Êtes-vous appareillé ? Comment avez-vous fait, et vécu, le choix de porter des prothèses auditives ou non ? Quelle est votre relation avec vos appareils ? Et si vous avez un ou des malentendants, appareillés ou non, dans votre entourage, comment voyez-vous cette aide technologique ? Êtes-vous conscient que l’appareillage ne résout pas tous les problèmes d’audition ? Avez-vous déjà conseillé à des proches de se faire appareiller ? N’hésitez pas à commenter pour partager votre expérience !

Les jours se suivent et ne se ressemblent pas

Il s’agit là d’un aspect de ma perte d’audition qui étonne, surprend, déconcerte et peut même énerver plusieurs personnes, y compris moi-même : je n’entends pas tous les jours pareil.

MerAgitee123rf

MerCalme123rf

 

 

La plupart du temps, j’entends « normalement« . Ce « normalement » signifie, pour moi, qu’il vaut mieux qu’il n’y ait pas trop de bruit de fond, que la personne (une personne à la fois, bien sûr) me parle bien en face, avec le visage éclairé et en articulant bien. Si la personne me tourne le dos, si l’eau coule ou l’aspirateur fonctionne, si je suis dans un café bruyant, alors je ne comprends généralement pas le sens de ce qui m’est dit et je fais répéter.

Et puis il y a des jours où je me réveille, et j’entends bien. Enfin, presque bien. Mieux que d’habitude en tout cas. J’entends le début de la musique du réveil, par exemple. Et les premières paroles marmonnées sur l’oreiller avant même d’avoir ouvert les yeux, je les comprends aussi. J’en oublie même de mettre mes appareils quelquefois, et malgré cela je parviens à comprendre des phrases chuchotées, mal prononcées, ou des paroles dites sans me regarder, et ce du premier coup ! C’est comme un petit miracle, à chaque fois. Parfois, j’ai l’impression que si j’allais chez l’ORL pour faire un audiogramme ce jour-là, j’en ressortirais avec une audition quasi-normale. Enfin, n’exagérons rien… Mais en tout cas, la différence par rapport aux jours normaux est assez importante pour étonner mes proches (et moi-même) à chaque fois.

Et puis il y a ces autres jours. Les jours où je n’entends plus rien. C’est l’impression que j’en ai en tout cas. Je mets plusieurs minutes à entendre le réveil, et ensuite tout est du même acabit. Je dois faire répéter chaque phrase 3 ou 4 fois, et j’ai l’impression de me promener dans un brouillard auditif constant qui m’empêche de me concentrer, d’entendre, de comprendre les sons que j’entends, et même de réfléchir. C’est comme si j’évoluais dans un magma sonore qui n’a aucun sens. Il me faut déployer des efforts immenses pour tenter de démêler les sons les uns des autres, et de comprendre ce qui m’est dit. C’est épuisant ! Et par conséquent, j’ai davantage tendance à lâcher prise et à ne plus faire attention aux sons, ce qui crée des situations délicates avec mes proches qui, eux, tentent toujours de communiquer avec moi.

Ces différents types de journées peuvent se succéder rapidement, avec un jour où j’entends bien, suivi immédiatement d’un jour où je ne comprends plus rien. Mais alors, pourquoi ? Je n’ai pas trouvé toutes les réponses à cette question. Mais j’ai observé certains éléments récurrents qui peuvent former une ébauche d’explication, à savoir que ma capacité à entendre varie énormément suivant l’état dans lequel je suis, et ce de plusieurs manières :

  • Mon état physique

Si je suis en parfaite forme physique, j’entends mieux. Sans aucun doute. Je m’en suis rendu compte maintes fois. Si je me suis couchée trop tard, si j’ai un peu bu ou même si j’ai trop mangé (ou mangé trop sucré et trop gras) la veille, mon corps est plus lent, prend plus de temps à bouger, et mon niveau de concentration tombe dans les chaussettes. Et si je n’arrive pas à me concentrer, je n’arrive pas à comprendre ce que j’entends. Mon corps est donc un élément essentiel pour mon audition. Si je suis malade, d’autant plus si j’ai un rhume ou autre virus qui affecte la sphère ORL, si j’ai mal quelque part, si j’ai faim ou si je suis fatiguée, j’entendrai forcément moins bien. Et c’est rassurant ! Parce que cela signifie que si je prends bien soin de moi, je peux directement influencer ma capacité à entendre. Et c’est vrai que les jours où j’ai bien dormi, où je vais courir le matin, et où je mange aussi sainement que possible, il y a plus de chances que j’entende mieux que les jours où ce n’est pas le cas.

  • Mon état émotionnel

Mais le physique n’est pas tout, et il y a d’autres facteurs qui vont aussi affecter mon audition de façon subjective. Mes émotions, par exemple. Si je suis en colère, ou que j’ai une émotion forte, quelle qu’elle soit, alors je n’écoute plus. De même si je suis stressée. Le stress semble bloquer ma capacité à écouter, et donc à entendre, et si quelqu’un me le fait remarquer, il faut que je fasse un effort considérable pour lâcher prise, oublier mon stress et me concentrer sur ce qui se passe, et sur la conversation qui se déroule. Il s’agit là d’un facteur plus difficile à contrôler, dans la mesure où les émotions se produisent souvent en réponse à des événements ou autres déclencheurs. Ce qui reste positif, c’est que même si je suis aux prises avec une émotion forte, il y a toujours un moment où j’arrive à la gérer et à revenir à mon état normal, et à ma capacité habituelle d’audition et d’écoute.

  • Mon état mental

Même si je me sens plutôt bien physiquement et émotionnellement,  il suffit que j’ai quelque chose en tête qui me prenne beaucoup d’espace mental pour ne plus être capable d’entendre convenablement. Un petit exemple pour illustrer ceci : Tous les mois de novembre, je participe au NaNoWriMo, le mois national d’écriture de roman. Il s’agit d’un challenge personnel qui consiste en l’écriture d’un roman de 175 pages environ, soit 50 000 mots, entre le 1er et le 30 novembre. Il va sans dire que, quand on se plonge dans un tel marathon d’écriture, on a tendance à penser, manger, respirer et transpirer roman. Mon espace mental est donc, tous les mois de novembre, bien occupé par les personnages, les intrigues et les rebondissements de l’histoire que je m’emploie à écrire. Et c’est un peu au détriment de mon audition, certains jours. Il y a bien d’autres occasions, au cours de l’année, où mon mental est occupé par quelque chose de façon tellement exclusive que j’en oublie de faire attention aux sons. Il suffit que je réfléchisse à un nouvel article de blog, que je sois penchée sur une traduction particulièrement difficile, ou que je me fasse du souci à propos de quelque chose, et mon attention va se tourner vers l’intérieur. Mais heureusement, il suffit d’un rappel, comme la petite voix flûtée de l’enfant qui répète la même phrase pour la vingtième fois, et qui va finir par me tirer par la manche, pour que je revienne au présent et que j’accorde à ce qui est dit l’attention nécessaire à ma compréhension.

Ainsi, plusieurs facteurs influencent sans aucun doute la compréhension de ce qui m’est dit. Cette fluctuation quotidienne de mon audition est souvent déroutante, mais je ne peux qu’être reconnaissante d’un aspect très positif de cette situation : sans les jours sans, il n’y aurait pas les jours avec, ces jours où je me sens comme habitée par des super-pouvoirs qui me permettent d’entendre ce que je n’entendais pas la veille. Et ces jours-là, où j’ai l’impression d’être portée par l’Univers, où tout me sourit et où j’en oublie complètement que je n’entends pas bien, ces jours-là valent la peine de tout le reste.

Et vous, avez-vous aussi des jours où vous entendez moins bien que d’autres ? Comment gérez-vous cette fluctuation ? Avez-vous trouvé d’autres raisons qui expliquent votre baisse d’audition certains jours ?

Et si vous êtes proche d’une personne malentendante, avez-vous déjà observé cet état de fait ?

Perte d’audition : est-ce possible d’éviter l’isolement ?

DeathtoStock_NotStock5

 

C’est une situation assez courante pour moi. Quelquefois je ne m’en rends même pas compte. Je suis au café avec un groupe d’amis, la conversation est animée, les cafés s’enchaînent, et tout à coup je m’aperçois que cela fait une bonne demi-heure que j’ai décroché de la conversation, et que je suis perdue dans mes pensées. Ma concentration a des limites, et suivre une conversation de groupe me demande énormément d’énergie. Au bout d’un moment, je suis trop fatiguée et je n’arrive plus à faire les efforts nécessaires pour suivre la conversation. La conséquence : l’isolement.

Je suis invitée par un groupe d’amis à aller voir un film au cinéma. Le film n’est pas sous-titré, et le cinéma ne dispose d’aucun dispositif pour les malentendants. Je sais pertinemment que l’expérience sera désagréable pour moi tout autant que la personne à qui je demanderai de me raconter le film au fur et à mesure (et pour les autres qui seront gênés par les chuchotements intempestifs). Je décline l’invitation. La conséquence : l’isolement.

Je fais du yoga, du tai chi ou un autre sport en groupe. A la fin du cours, tout le monde se rassemble et discute autour du prof. Je n’arrive pas à suivre, et je préfère m’éclipser, prétextant devoir rentrer rapidement. Et puis, peut-être qu’au bout du compte, j’arrêterai d’aller aux cours, parce que le rappel de mon handicap sera omniprésent et douloureux. La conséquence : l’isolement.

Je suis dans la rue, en ville, avec ma famille. Mon enfant raconte sa journée d’école, tout en sautillant d’excitation. Il n’est pas assez grand pour avoir le visage au niveau de mes oreilles, loin s’en faut. Ce n’est pas possible pour moi d’entendre ce qu’il dit. Il est même probable que je ne me rende pas compte qu’il est en train de parler, et j’essaie de démarrer une discussion, interrompant ainsi la conversation qui est en train de se produire. Mon conjoint me le fait remarquer, et je ravale mes paroles, avec la honte de ne pas avoir compris ce qui se passait. Je continue donc à avancer, parallèle à la conversation mais sans pouvoir y participer. La conséquence : l’isolement.

Et si j’habite seule, je vais sûrement y réfléchir à deux fois avant d’accepter l’invitation aimable d’un collègue ou d’une voisine à une soirée où il y aura beaucoup de monde et de bruit, et où je sais pertinemment qu’il me sera difficile de communiquer. La conséquence : l’isolement.

Helen Keller, écrivaine américaine sourde et aveugle, l’a exprimé en disant :

«  La cécité me sépare des choses, la surdité me sépare des personnes. » 

En tant que personne malentendante, je me sens souvent séparée des autres, comme si un mur invisible nous empêchait de communiquer. Plusieurs études le confirment aussi. D’après une étude qualitative de l’Inpes sur les liens entre handicap auditif et santé, les chercheurs ont trouvé que :

«  Le discours des personnes sourdes ou malentendantes communiquant le plus souvent à l’oral est souvent empreint d’une grande souffrance psychologique. […] Pour beaucoup, l’isolement qui découle [des difficultés de communication] est renforcé ou produit par le manque d’accessibilité de l’environnement. »

Et une étude effectuée par la fondation Hear the World montre très clairement que le handicap auditif contribue au mal-être et à la dépression, surtout quand il n’est pas corrigé.

Alors que faire ? Sommes-nous pour autant condamnés, en tant que malentendants, à rester sur le banc de touche de la vie, observant ce qui se passe comme un film muet (ou presque) ? Je ne le pense pas. Voici les quelques astuces que j’ai trouvées pour rompre l’isolement dans la majorité des situations :

  • Se faire appareiller.

L’appareillage, ce n’est pas magique, mais ça aide. Vraiment. La première fois que j’ai discuté des possibilités d’appareillage avec mon audioprothésiste, une bouffée d’espoir m’a submergée. J’étais certaine que ces appareils auditifs de pointe allaient remplacer toutes les fréquences manquantes de mon audition, et me permettre de redevenir entendante. Alors, ça ne s’est pas passé exactement comme ça, mais il faut bien avouer qu’avoir des appareils auditifs, c’est mieux que de ne pas les avoir. Grâce aux appareils, j’entends certaines personnes que je devrais faire répéter autrement. Certaines situations deviennent plus faciles, ou moins fatigantes. Bien sûr, la condition, c’est de les mettre. Le cerveau a besoin de se réhabituer ou de s’habituer au niveau sonore normal, et c’est important de porter les appareils le plus possible.

  • Dire aux gens que l’on entend mal.

J’ai trouvé que plus j’assume mon handicap auditif, plus j’en parle aux gens que je rencontre, et plus c’est facile de ne pas m’isoler. De plus, cela donne lieu à des conversations très intéressantes sur l’audition, le handicap et comment ça marche. Les gens sont intéressés, la plupart du temps ! Pour cela, il vaut mieux en parler de façon très simple, sans donner l’impression que l’on est en train de se plaindre ou d’essayer de susciter la pitié. Une fois que j’ai dit aux gens que je suis malentendante, ils font tout pour m’inclure dans la conversation, et je n’ai plus envie ni besoin de m’isoler.

  • Rappeler aux gens que l’on entend mal.

Mais souvent, les gens oublient. Parce que cela ne se voit pas. Et ils arrêtent de faire attention, et ce serait très tentant pour moi de m’isoler à ce stade-là de la relation. De me dire : « Ah, ils ne font plus d’effort ! Eh bien tant pis ! » et de partir dans mon monde intérieur, séparé des autres par ce mur d’incompréhension. Et je l’ai déjà fait. Mais je me sens mieux si je rappelle aux personnes avec qui je suis que je suis malentendante et que je n’arrive plus à suivre la conversation parce qu’ils parlent trop vite, trop doucement ou trop indistinctement. Et immédiatement, ils s’excusent, et se remettent à faire des efforts.

  • Sortir de la zone de confort.

Pour moi, sortir de ma zone de confort, cela signifie me pousser à faire des choses que j’ai peur de faire parce que je crains que cela se passe mal en raison de mes problèmes d’audition. Par exemple, aller au théâtre. C’est souvent une expérience difficile parce que s’il s’agit d’une pièce basée sur les dialogues, je n’arrive pas à suivre assez bien pour en profiter vraiment. Mais il y a un tas d’autres spectacles desquels je peux profiter même si je n’entends pas tout ! Par exemple, les spectacles de cirque, ou les spectacles basés sur un humour de situation, où même si je ne comprends pas tout ce qui est dit, je passe quand même mon temps à rire. Mais si j’associe le théâtre à une expérience négative, alors je n’y vais plus, et je loupe ces spectacles qui me plaisent. C’est pour ça que, de temps en temps, je me « force » à sortir de ma zone de confort, et j’accepte d’aller à un concert, à un spectacle ou à un événement auquel j’éviterais normalement d’aller. Juste au cas où la magie opère et que cela en vaille la peine. Et c’est souvent le cas…

  • Faire ce que l’on aime.

Il s’agit là d’une astuce qui règle beaucoup de problèmes, et pas seulement celui de l’isolement. C’est une astuce de bien-être général. Quand je fais ce qui me plaît, c’est-à-dire que je passe du temps dans la journée à écrire, à être créative, à travailler sur ce blog ou autres, je me sens mieux. Et quand je me sens mieux, je ne vis pas mes problèmes d’audition de la même façon que lorsque je me sens mal, triste ou déprimée. Quand je fais ce que j’aime, et que je travaille sur des projets qui ont du sens pour moi, j’ai l’impression d’avancer, d’aller quelque part dans ma vie (même si je ne sais pas forcément où je vais pour autant). En conséquence, j’ai davantage de ressources et de résilience pour assumer mon handicap, en parler, le rappeler aux personnes que je côtoie, et ne pas me laisser abattre par les problèmes de communication. Quand je me sens bien, j’ai envie de partager, et j’ai l’énergie qu’il faut pour communiquer malgré les difficultés.

  • S’entourer de personnes réconfortantes.

Là encore, cette astuce est utile dans de nombreuses situations. Même si je me sens déprimée, ou abattue, et que j’ai tendance à m’isoler, mon entourage, s’il est encourageant et positif, va m’aider à passer par-dessus. Les personnes qui nous entourent jouent un rôle important dans notre vie : elles nous soutiennent ou nous découragent, elles nous aident à voir le côté positif des choses ou au contraire vont nous entourer de négativité. C’est pourquoi il est très important de s’entourer des bonnes personnes : celles qui nous soutiendront, sans nous juger, et qui nous écouteront avec empathie, avant de nous aider à passer par dessus les moments de déprime.

  • Ne pas se décourager.

Malgré tout cela, cela m’arrive de m’isoler. Quelquefois, l’isolement est un état que je recherche, comme un instant de répit : dans une soirée bruyante, au bout d’un moment, j’aurai besoin de sortir au calme, pour reposer les oreilles et reprendre des forces avant de pouvoir affronter à nouveau le bruit et le tourbillon des gens. Au milieu d’un mois particulièrement chargé, j’aurai besoin de passer une ou plusieurs soirées à lire un livre. Et puis, quelquefois, je m’isole parce que je n’arrive plus à assumer cette perte d’audition qui me fait perdre le contact avec des aspects de ma vie que j’aimais, comme certains domaines de la vie culturelle, la musique, les amis qui vivent à l’étranger et que je ne peux plus appeler parce que je ne les comprends plus assez bien au téléphone. Et je me terre, je refuse les invitations pendant un certain temps. Ne pas se décourager, pour moi, cela signifie que j’accepte que ces moments font partie de ma vie. Ce ne sont pas les moments les plus glorieux, ni les plus agréables à vivre, mais avec l’aide des astuces ci-dessus, ils finissent par passer, et je peux recommencer à communiquer, et à sortir de l’isolement. Comme le dit le proverbe japonais :

« Le succès c’est tomber sept fois, se relever huit. »

Ce que je veux dire quand je dis que je suis malentendante…

Comment ?

Avant, je n’osais pas le dire. Maintenant, j’ose. C’est même souvent une des premières choses que je dis quand je rencontre quelqu’un. Par contre, comment est-ce reçu, perçu, compris ?

Je me suis rendu compte assez vite que la plupart des gens, quand je dis « Je suis malentendante », n’ont aucune notion de ce que j’entends par là. Qu’est-ce que cela implique, pour eux ? Comment doivent-il ajuster leur façon de communiquer pour que je puisse les comprendre ? Cela reste très flou. Le Bucodes SurdiFrance a créé une brochure sur ce sujet qui est très bien conçue, mais à laquelle tout le monde n’a malheureusement pas encore eu accès. Je vais donc tenter ici d’expliquer plus précisément ce que je veux dire quand je dis que je suis malentendante. Et tout d’abord :

  1. Je n’entends pas bien.
    Cela signifie que, même si je suis appareillée, certaines fréquences ne passent pas aussi bien que d’autres, déformant du même coup vos paroles. À cause de cela, c’est difficile de comprendre ce que vous dites si vous ne faites pas un effort de clarté. Qu’est-ce que cela signifie exactement ? Eh bien tout d’abord que :

  2. Ce n’est pas la peine de hurler.
    Si vous parlez trop fort ou si vous criez, vous aurez tendance à déformer davantage les sons, rendant ainsi la compréhension encore plus difficile pour moi. De plus, le fait d’être en face de quelqu’un qui crie peut me faire paniquer. Et dans ce cas, je risque de me bloquer et de ne plus rien comprendre à ce que vous dites. Parlez donc assez fort pour que je perçoive les sons, bien sûr, mais le plus important, c’est :

  3. Parlez clairement.
    Articulez correctement, sans exagérer les mouvements de votre bouche non plus. Si vous amplifiez votre diction outre mesure, j’aurai plus de mal à lire sur vos lèvres, et je pourrais même avoir l’impression que vous êtes en train de vous moquer de moi. C’est important que vos paroles soient aussi claires et nettes que possible. S’il vous plaît, évitez de parler la bouche pleine, ou de mâcher un chewing-gum en même temps. Et si vous avez une barbe, alors il faudra que vous fassiez encore plus attention de parler très distinctement. Au besoin, parlez plus lentement, surtout si vous avez tendance à parler très vite d’habitude.

  4. Regardez-moi quand vous parlez.
    Je lis aussi sur vos lèvres, et sur vos expressions faciales. Ma compréhension est basée sur un mélange de ce que j’entends et de ce que je vois. Autant dire que si je ne vois pas vos lèvres parce que vous mettez votre main ou votre stylo devant, que vous avez une barbe épaisse ou une moustache longue qui cache tous les mouvements de vos lèvres, ou que vous n’êtes pas en face de moi, il y a de grandes chances que je ne comprenne pas ce que vous dites. Si vous plongez dans votre sac à main tout en me parlant, vous pouvez être sûre que je n’aurai pas compris vos paroles. De même si vous vous tournez pour faire quelque chose derrière moi. Ou que vous me parlez en étant dos à moi. C’est si vous êtes en face de moi ou légèrement de trois quart que je vous comprendrai le mieux.

  5. Évitez d’être à contre-jour.
    Pour les mêmes raisons, si vous êtes à contre-jour, je risque d’être éblouie. Votre visage étant dans l’ombre, je ne pourrai pas voir vos lèvres ni l’expression de votre visage, et je vous comprendrai moins bien. Si c’est le cas, échangez votre place avec la mienne pour que je puisse vous voir correctement, ou tournez-vous légèrement pour que votre visage soit éclairé.

  6. Rapprochez-vous.
    Je sais que ce n’est pas toujours facile, surtout si on ne se connaît pas beaucoup. Nous avons tous tendance à avoir envie de préserver notre bulle d’espace personnel, mais si vous êtes assis sur un canapé à un bout de la pièce et que je suis à l’autre bout, je ne vous entendrai pas. Si je vois que vous êtes en train de me parler, je me rapprocherai automatiquement de vous, en vous faisant répéter ce que vous venez de dire, mais si je ne peux pas me déplacer pour une raison quelconque, alors venez plus près de moi. Et s’il y a du bruit dans la pièce, le rapprochement sera d’autant plus important qu’il est certain que je ne vous comprendrai pas sans cela.

  7. Changez de formulation.
    Si cela fait trois fois que je vous demande de répéter une phrase, alors il est possible que je fasse un blocage sur un mot ou un groupe de sons. Quel que soit le nombre de fois que vous répétez, même si vous parlez clairement, en face de moi et que vous faites attention, il arrive un point où ce n’est plus la peine d’insister. En général, dans ces cas-là, il suffit d’exprimer ce que vous vouliez dire avec d’autres mots, car cela me permettra de passer par dessus mon blocage.

  8. N’oubliez pas.
    Ce point là est plus difficile. Mon problème d’audition ne se voit pas, et ne s’entend pas. C’est donc très probable qu’à un moment donné, vous aurez oublié que je n’entends pas bien (je l’oublie moi-même régulièrement !), et que vous recommencerez à parler vite, doucement, et sans me regarder. Cela arrive à tout le monde. Et c’est aussi mon rôle de vous le rappeler. Mais si, alors que vous avez oublié, je vous dis ou vous montre que je n’ai pas compris ou que je n’arrive pas à suivre, alors essayez de vous rappeler et de faire un effort. Ce n’est pas toujours évident de le dire et d’en parler ouvertement, et encore moins de le répéter. C’est plus facile de me dire qu’en fait ce n’est pas important pour vous, et que votre simple oubli est un comportement délibéré, même si je me doute que ce n’est pas le cas. Si vous faites un effort à chaque fois que vous vous en souvenez, vous me montrerez que c’est important pour vous que je vous comprenne, et que vous faites tout pour cela.

Ce sont là les huit points qui sont les plus importants pour moi. J’essaie d’en parler aux gens que je côtoie, parce que c’est trop facile de m’isoler, de faire comme si et de passer à côté de toutes les conversations si je ne dis rien. C’est aussi très facile de devenir paranoïaque et de penser que les gens ne font pas attention à moi exprès… Pour casser cette tendance, j’en parle, et je le rappelle autant que possible.

Et pour vous, si vous êtes malentendant aussi, y a-t-il des points que j’ai mentionnés qui ne sont pas importants pour vous ? Ou d’autres dont je n’ai pas parlé, qui vous paraissent essentiels ? Comment demandez-vous aux gens de vous parler ? Avez-vous trouvé d’autres astuces qui fonctionnent pour vous ?
Et si vous côtoyez des malentendants, aviez-vous conscience de tous les points ci-dessus ? Avez-vous été dans des situations où d’autres comportements ont été utiles pour communiquer avec vos proches malentendants ?