La saga des appareils auditifs – le financement

Comme tout le monde le sait, les appareils auditifs sont un luxe hors de prix. C’est un luxe dont nous avons cruellement besoin, malgré tout. Alors heureusement, nous avons accès à certains financements qui peuvent nous aider à acquérir ces petits objets qui pourront nous faciliter un peu la vie.

Les dossiers de financement - une activité à part entière !

Cette fois-ci, j’ai pu trouver des financements que je n’aurais pas cru possibles, et ce entre autres grâce à mes lecteurs ! Grâce à une lectrice en particulier qui m’a indiqué un lien très utile (merci Maryannick !!) qui tombait à point nommé. Malheureusement, je m’y suis prise un peu tard (en même temps, difficile de prévoir mieux avec une panne inattendue), et j’ai la chance d’avoir un audioprothésiste très patient, parce que sinon, ça n’aurait juste pas été possible.

Trouver les financements possibles

Il existe de nombreux financements possibles, selon les différents cas de figure de la personne sourde ou malentendante, son niveau de surdité, son âge, son type de handicap, etc. Par exemple, les personnes mineures, et jusqu’à 20 ans, bénéficient d’un tarif préférentiel de remboursement par la sécurité sociale. Les personnes sourdaveugles bénéficient du même tarif. Et les personnes qui ont une surdité de plus de 70dB ont droit à différents types d’aides de la part de la MDPH. Il est donc important de bien se renseigner.

La sécurité sociale

Vous trouverez toutes les informations sur la prise en charge des appareils auditifs par la sécurité sociale selon les différentes situations ici.

Pour les moins de 20 ans, « les prothèses auditives sont remboursées à 60 %, sur la base d’un tarif allant de 900 euros à 1 400 euros, selon la classe de l’appareil prescrit. » Le même remboursement s’applique aux personnes qui souffrent de surdité et de cécité, quel que soit leur âge.

Par contre, pour les plus de 20 ans, c’est beaucoup moins drôle : « Les prothèses auditives sont remboursées à 60 %, sur la base d’un tarif fixé à 199,71 euros, quelle que soit la classe de l’appareil prescrit. » Connaissant le prix d’un appareillage auditif, ça ne fait pas lourd !

Une fois que vous avez acheté vos appareils, pensez à demander une feuille de soin tous les ans à votre audioprothésiste, afin de vous faire rembourser des frais d’entretien, piles, embouts, etc. : « Ces frais d’entretien sont pris en charge par l’Assurance Maladie sur présentation des justificatifs de dépenses. Ils sont remboursés à 60 % sur la base d’une allocation forfaitaire annuelle fixée par la LPP* à 36,59 euros par appareil. »

Si vous êtes à la CMU, alors vous bénéficiez d’une meilleure prise en charge de votre appareillage. Vous pourrez vous faire rembourser jusqu’à 1400 euros pour un appareillage bilatéral tous les quatre ans. Vous trouverez plus de détails ici.

La complémentaire santé

Alors là, bien sûr, la prise en charge des appareils dépend des complémentaires santé. Si vous avez la chance d’avoir une bonne complémentaire santé, vous aurez peut-être un remboursement conséquent. Pendant plusieurs années, à chaque fois que la date de renouvellement de ma complémentaire santé approchait, je me lançais dans une grande recherche sur internet, pour trouver enfin LA perle rare qui rembourse bien les appareils auditifs sans me coûter un bras chaque mois. Eh bien je n’ai pas trouvé. J’ai fini par abandonner, après m’être rendu compte que la plupart du temps, une complémentaire santé qui rembourse bien les appareils auditifs coûte aussi cher que si je mettais de l’argent de côté chaque mois pour acheter les appareils moi-même. Pas la peine, donc.

Attention ! Si votre complémentaire santé dit qu’elle rembourse les appareils à 100%, n’oubliez pas que cela signifie simplement qu’elle complète le remboursement de la sécurité sociale sur la base de son tarif de 199,71 euros par appareil.

AGEFIPH ou FIPHFP

Voilà le financement que j’ai découvert cette année. En tant qu’auto-entrepreneur, je ne pensais pas avoir droit à un financement d’un organisme qui finance avant tout les salariés. Et en fait si !!

Si vous êtes entrepreneur, indépendant ou salarié du secteur privé, vous aurez droit à une aide de l’AGEFIPH. Il s’agit d’un montant forfaitaire maximum de 700 euros par appareil, 1400 euros pour 2 appareils. C’est toujours ça de pris ! Et il est possible d’avoir un financement de la MDPH aussi !

Si vous êtes employé dans le secteur public, alors il faudra vous tourner vers le FIPHFP pour obtenir un financement. Je n’ai pas eu d’expérience directe avec cet organisme, donc je me rends moins bien compte des délais, ou des conditions. Apparemment, le FIPHFP finance jusqu’à 3000 euros pour trois ans.

Par contre, pour obtenir un financement de la part de ces organismes, il est obligatoire d’avoir une reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé (RQTH), ou d’en avoir fait la demande à la MDPH (une preuve que le dossier est en cours peut suffire).

Alors par contre, si on est en recherche d’emploi, ou sans emploi, ces organismes ne semblent pas être adaptés. Auquel cas, il faut se tourner vers la MDPH (maison départementale des personnes handicapées).

MDPH

La MDPH, c’est LE financement incontournable à demander. Et c’est important d’effectuer cette demande (le plus tôt possible, comme on le verra par la suite).

Je reprends encore une fois le site du Bucodes SurdiFrance :

« La Prestation de Compensation du Handicap ou PCH est une aide financière apportée par les MDPH (Maison Départementale des Personnes Handicapées) aux personnes reconnues comme handicapées. Elle est soumise à diverses conditions.

  • Conditions administratives : il faut justifier d’une résidence stable et régulière en France métropolitaine. Les personnes étrangères (hors communauté européenne) doivent en outre justifier d’une carte de résident ou d’un titre de séjour.
  • Conditions d’âge : avoir moins de 60 ans. Cet âge est porté à 75 ans si on peut justifier d’une reconnaissance de handicap (donc de surdité même partielle) avant l’âge de 60 ans ou si la personne a une activité professionnelle rémunérée. Une activité de bénévole n’est pas prise en compte.
  • Conditions de handicap : il faut que soient reconnues une difficulté absolue ou 2 difficultés graves dans la réalisation d’activités inscrites dans une liste qui comprend cinq domaines : mobilité, entretien personnel, communication, tâches et exigences générales, relations avec autrui.
  • Les déficients auditifs entrent dans le domaine de la communication. Quatre cas y sont répertoriés, dont les deux suivants :
  • difficulté à entendre (percevoir les sons et comprendre)
  • difficulté à utiliser les appareils et techniques de communications : le téléphone en fait partie.

Normalement on considère que :

  • si la perte auditive moyenne est supérieure à 70 décibels, il y a difficulté absolue à entendre ;
  • si la perte auditive est inférieure ou égale à 70 décibels, il faut prouver que l’on a deux difficultés graves : entendre et utiliser les appareils de communication, notamment le téléphone. »

En gros, le PCH finance 399,42 euros par appareil si notre perte auditive est inférieure ou égale à 70 dB, et 599,13 euros pour une perte supérieure à 70 dB.

Mon expérience avec la MDPH

Pour moi, le dossier de la MDPH s’est toujours fait en deux temps : le dossier passe à une première commission, où il est refusé systématiquement parce que je n’ai pas une perte supérieure à 70 dB. En fait, je n’ai pas droit à la PCH. Peut-être parce que je ne prouve pas assez bien qu’il m’est très difficile d’utiliser le téléphone, par exemple. Il faudra que j’insiste sur ce point la prochaine fois et je verrai si ça change quelque chose.

Puis le dossier passe devant le comité de gestion du fonds départemental de gestion du handicap (FDC). Là je reçois tout un tas de papier à remplir pour justifier de mes ressources, de mes charges, etc. En général, j’ai droit à un financement de la part de ce comité.

Toutes ces démarches avec la MDPH prennent vraiment beaucoup de temps. Surtout si on n’a pas droit à la PCH et qu’on doit passer devant le deuxième comité. D’ailleurs, j’ai commencé à monter mon dossier en avril-mai, j’ai dû l’amener à la MDPH en juin, et je viens juste de recevoir aujourd’hui la réponse du deuxième comité. Et c’était rapide !! La dernière fois, ça avait pris 9 mois.

Il faut penser que ces délais sont variables d’une MDPH à l’autre. Je ne sais pas non plus si le fonds départemental de gestion du handicap est disponible partout, et si c’est la MDPH qui s’en occupe dans tous les départements. Si vous le savez, n’hésitez pas à nous renseigner !

Monter les dossiers de financement

Le dossier de la MDPH est celui qui prend le plus de temps. C’est donc important de penser à le préparer en premier.

Lorsque c’est possible, démarrez les dossiers de financement avant de commencer le mois d’essai des appareils. Les dossiers demandent des devis, donc cela vous permet d’aller voir chez quelques audioprothésistes et de faire des comparaisons, mais c’est une bonne idée de démarrer les dossiers avant de prendre les appareils, à moins que votre audioprothésiste soit très patient (comme le mien…).

Par contre une fois les accords de financement reçus, il ne faut pas trop tarder avant d’envoyer les factures, sous peine de perdre les financements (pour les financements AGEFIPH, on a trois mois pour clore le dossier et demander le financement, sinon c’est annulé).

Se faire aider pour monter les dossiers

Quand je me suis retrouvée devant le dossier AGEFIPH et le dossier MDPH à monter en même temps, j’ai commencé par procrastiner sérieusement pendant plusieurs semaines. Ce n’était pas évident de remplir tous ces papiers !

J’ai fini par demander de l’aide. Bien m’en a pris ! J’ai contacté le SAMETH de ma ville, j’ai eu un rendez-vous dans la semaine. J’ai rencontré une conseillère qui m’a aidé à remplir les formulaires et surtout à déterminer les pièces que je devais joindre au dossier. Et en tant qu’indépendante, ce n’était pas évident à savoir.

Vous pouvez trouver les coordonnées du SAMETH de votre département sur le site de l’AGEFIPH. En Charente, en tout cas, ils sont très réactifs et ils m’ont bien aidée.

Il est possible aussi de se tourner vers des associations de malentendants pour trouver de l’aide pour remplir les dossiers, et la MDPH propose aussi de l’aide pour remplir son dossier.

Voilà donc en gros les démarches à faire pour se faire financer.

Si vous avez trouvé d’autres organismes financeurs, n’hésitez pas à partager dans les commentaires ! Et si vous avez des astuces pour simplifier les démarches aussi !

La saga des appareils auditifs – l’audioprothésiste

Cet article est le deuxième d’une série d’articles où je partage mon expérience lors du renouvellement de mes appareils auditifs. Si vous n’avez pas lu le premier article de la série, vous pourrez le découvrir ici !

L’audioprothésiste

La deuxième décision à prendre, c’est l’audioprothésiste. Est-ce que je continue à aller voir celui chez qui je vais depuis 8 ans, même s’il est loin, que ce n’est pas pratique et que certains de ses commentaires et remarques m’ont bien montré que nous ne partageons pas les mêmes valeurs ?

RDV chez l'audioprothésiste

Ou bien est-ce que je choisis un audioprothésiste plus près de chez moi, quitte à établir une nouvelle relation ?

Impossible de prendre cette décision sans aller voir quelqu’un près de chez moi, pour voir. J’ai commencé par Amplifon, qui m’avait été recommandé par des professionnels de l’association Diapasom. L’avantage, c’est que leur centre est à moins de 10 minutes à pied de chez moi. Très pratique, donc.

J’y suis passée un midi alors que j’étais justement dans les parages. Ça m’a permis de me familiariser avec le lieu et les gens et de voir si l’ambiance me convenait. Et j’ai rencontré un des deux audioprothésistes du centre et pris rendez-vous avec lui quelques jours plus tard, à un moment où il aurait du temps à m’accorder. Premier contact très agréable dès le départ. D’abord, parce que je le comprenais très bien, et aussi parce que j’avais l’impression d’être vraiment écoutée.

Le premier rendez-vous

Le moment du rendez-vous attendu est arrivé, et je n’ai pas été déçue. J’ai eu droit à un audiogramme très complet, sans appareils d’abord, comme chez l’ORL, puis avec les appareils, pour vérifier la récupération que j’avais. Je n’avais jamais fait cela !! En 8 ans d’appareillage, JAMAIS mon audioprothésiste ne m’a fait passer un test pour vérifier ce que je parvenais à entendre avec les appareils.

Et là, je me suis rendu compte que ma récupération était très faible. Pour les fréquences graves, les 250 et 500 Hz, eh bien que j’aie des appareils ou non, cela ne changeait rien. Pas un iota de plus avec les appareils. Pour les médiums, peut-être 10 à 15 dB de récupération, donc très peu par rapport à ma perte qui va jusqu’à 70 dB selon les fréquences. Pour les aigus, eh bien il n’y avait pas beaucoup d’amélioration non plus mais j’entends assez bien les aigus, donc ce n’était pas un souci. Par contre, on a fait un test de compréhension vocale. Et là, j’ai compris pourquoi j’avais tant de difficultés ! En fait, je comprenais tous les mots à 60dB. Par contre, à 50 dB, je n’en comprenais que la moitié. Et à 40 dB, je n’en comprenais pas un seul !

Le nouvel audioprothésiste m’a expliqué que 60 dB, c’est à peu près le volume de la parole pour les gens qui parlent assez fort. Mais que la plupart des gens ne parlent pas constamment à 60dB. Ils ont des moments où la voix est plus forte, et des moments où elle est moins forte. Et là, j’ai compris ma difficulté avec les personnes dont la voix a beaucoup d’inflexions. Il y a des pics de volume suivis par des moments où cela n’est pas assez fort. Au final, je n’arrive pas à avoir une compréhension globale de ce qui est dit. Et voilà pourquoi j’avais tant de mal à comprendre. Et aussi pourquoi il n’y avait que peu de différence entre mon audition avec et mon audition sans les appareils.

Ce premier rendez-vous m’a confortée dans mon idée de changer d’audioprothésiste. Enfin, j’avais une visibilité sur ce que mes appareils m’apportent vraiment ! Cela devrait être obligatoire !!

Je partagerai la suite de mon parcours dans mon prochain article, dans quelques jours ! Et si vous avez des questions ou commentaires en attendant, n’hésitez pas !

La saga des appareils auditifs – La panne

La panne

Il y a trois semaines, par un beau dimanche matin, mon appareil gauche est tombé en panne. Entendez par là que ce matin-là, impossible de l’allumer. J’ai changé la pile, tout ça, mais rien. Paniiiiique !!

Appareils en panne

J’ai écrit à mon audioprothésiste en plein dimanche, pour lui demander si cela serait possible de le voir en urgence le lendemain pour voir ce qu’on peut faire. J’ai eu la chance que mon audioprothésiste travaille aussi chez lui le dimanche, et me réponde dans l’heure qui suivait pour me donner une heure de rendez-vous le lendemain. Oui, parce que je n’avais pas changé d’audioprothésiste depuis mon premier appareillage en 2009, et j’ai déménagé entre temps. Du coup, il est maintenant à une centaine de kilomètres de chez moi, ce qui n’est pas très pratique, il faut bien en convenir.

Branlebas de combat !

Le lendemain, donc, me voilà partie en train pour un passage éclair à Bordeaux. Et là, en discutant avec mon audioprothésiste, je me rends compte que mes appareils ont déjà 5 ans. Ils sont quasiment en fin de vie. Il est donc relativement normal qu’ils tombent en panne.

Ceci dit, c’est la première fois que j’ai un appareil qui tombe en panne. Je n’avais jamais vécu ce sentiment d’anxiété que soudain, l’outil qui m’aide tous les jours ne s’allume juste plus, et la question lancinante de : comment faire maintenant ??

L’audioprothésiste a regardé mon appareil, et a confirmé : il était mort. Ce n’était pas la pile, ni le haut-parleur déporté. Nous avons décidé de l’envoyer chez le fabricant pour avoir un diagnostic malgré tout. Mais, en regardant les factures, il m’a expliqué que vu leur âge, cela ne valait peut-être pas le coup de le faire réparer. Et il m’a prêté un appareil en attendant que je décide de ce que j’allais faire.

L’appareil qu’il m’a laissé était un appareil de prêt. Ce qui signifie qu’au bout d’un mois à six semaines après avoir été programmé, l’appareil se bloque et se met à émettre un sifflement, ou à ne plus fonctionner comme il devrait. Ce n’était donc pas une solution à long terme, et il fallait que je réfléchisse assez vite à ce que je comptais faire.

Pendant quelques jours, je me suis posée la question : et si je n’en avais plus besoin ? Est-ce que je pourrais m’en sortir sans appareils ? Est-ce que ce serait une bonne idée ?

Premières décisions

Ma première décision a été de répondre à cette question. J’ai dû mettre une semaine avant de vraiment me dire que si, quand même, je n’allais pas arrêter là l’aventure de l’appareillage auditif. Plusieurs éléments ont eu du poids dans cette décision. D’abord, j’ai eu une rentrée d’argent inattendue. Cela m’a permis d’appréhender la dépense énorme que représentent deux appareils auditifs neufs avec un peu plus de sérénité. Ensuite, j’ai imaginé la possibilité de me débrouiller sans appareils du tout, à aucun moment, dans aucune situation. Et le désarroi que j’ai ressenti m’a montré assez clairement que ce n’était pas une bonne idée de me passer d’appareils complètement. Et enfin, ma geek intérieure était très curieuse de l’évolution de la technologie en cinq ans. Je voulais découvrir de première main ce qui s’était amélioré et affiné depuis mon dernier appareillage.

Donc première décision : oui !!

Et ensuite s’est posée la question : comment ? Est-ce que je retourne chez mon audioprothésiste chez qui je vais depuis 8 ans ? Je le connais bien, ça m’évite de devoir établir une nouvelle relation avec un autre professionnel. Et en plus, il me propose des accessoires qui me permettront d’effectuer des réglages à distance, ce qui m’éviterait de retourner tout le temps à Bordeaux. Et il me propose le nec plus ultra de la marque avec laquelle il travaille à un prix défiant toute concurrence.

Je vous raconterai la suite de mon parcours dans mon prochain article, d’ici quelques jours !!

Être malentendant en voiture

difficile de communiquer en voiture

Imaginez un peu le scénario :

Vous entrez dans la voiture. C’est vous qui conduisez, et vous prenez place derrière le volant, tandis que votre conjoint/ami/enfant s’assied à la place du passager. Vous démarrez, et le trajet commence. Votre interlocuteur vous parle, et bien sûr, vous avez du mal à l’entendre, à cause du bruit du moteur et du fait que vous êtes en train de regarder la route, et non ses lèvres/son visage.

Réflexe : vous vous tournez vers le passager pour tenter d’entendre (et de lire) ce qui est dit, mais pendant ce temps, vous ne regardez pas la route.

Un coup de klaxon vous ramène à la route, mais le bruit soudain vous fait peur et vous faites un petit écart. La voiture qui vous double doit faire un écart elle aussi pour vous éviter, et vous vous faites klaxonner d’autant plus.

Votre interlocuteur, pendant ce temps-là, panique et vous réprimande, mais vous ne parvenez pas à comprendre ce qui est dit, et l’ensemble des stimuli qui arrivent en même temps vous fait perdre pied.

C’est un scénario catastrophe, certes, mais tellement plausible pour quiconque entend mal.

L’environnement de la voiture pose en effet plusieurs problèmes pour un malentendant. Et cela peut avoir des conséquences plus ou moins graves ou même dramatiques, suivant la situation.

Le bruit en voiture

D’abord, le bruit ! Parce qu’à moins d’être dans une voiture électrique ou hybride extrêmement silencieuse, le bruit du moteur est déjà un vrai frein à une communication orale avec un malentendant. Et plus on va vite, pire c’est ! La conversation sur l’autoroute peut vite tourner au dialogue de sourds !

Et c’est sans compter le bruit de la ventilation, qu’il s’agisse du chauffage ou de la climatisation, ou des fenêtres ouvertes ! Et imaginez si on rajoute un peu de musique à tout ça, ou même une conversation entre plusieurs personnes, la cacophonie devient insupportable pour une personne qui entend mal.

Le manque de contact visuel

Quand on est en voiture, le conducteur est censé regarder la route avant tout. Si la personne malentendante est aussi celle qui conduit, elle va avoir tendance à se tourner vers son interlocuteur pour mieux comprendre ce qu’il dit, grâce à la lecture labiale, et à l’interprétation des expressions faciales, ce qui risque de faire peur à son interlocuteur qui préfèrerait qu’elle se concentre sur la route devant elle.

Si la personne malentendante est du côté passager, elle verra le conducteur de profil, ce qui généralement ne lui donne pas une assez bonne visibilité pour bien comprendre ce qui est dit.

Et si la personne est à l’arrière, alors elle pourra discuter éventuellement avec la personne à côté d’elle, s’il y en a une, mais pas avec le conducteur ou le passager qui sont devant (ou alors, avec beaucoup de difficultés). De même, une personne malentendante à l’avant aura beaucoup de mal à comprendre ce qui se passe derrière.

Alors la communication en voiture… Comment dire. Eh bien si votre fiancé(e) est malentendant(e), ne pensez pas qu’une longue balade en voiture vous permettra d’avoir cette conversation romantique dont vous rêviez depuis plusieurs jours. Cela risque plutôt de donner quelque chose du genre :

« Dis, chéri, tu sais quoi ?
– Hein ? Tu dis quoi ?
– Je voulais juste te demander quelque chose ?
– Ah, oui, attends ! Il faut que je me concentre sur la route, là.
– Oui bien sûr… »

Et plusieurs minutes (et virages) plus tard :
« Tu voulais me dire quoi ?
– Ah ! Regarde la route ! Tu as failli te prendre le trottoir, là.
– Mais tu me parles ! Tu sais bien qu’il faut que je te regarde pour te comprendre !
– OK, ben regarde la route alors, on se parlera plus tard »

Puis, le reste du trajet en silence.

Ou alors :

« Dis chéri, tu te rappelle de nos vacances à l’Ile d’Oléron ?
– Quoi ? Qu’est-ce qui est rond ?
– Non, je parle de l’ILE D’OLERON !
– Ah, euh oui, et quoi ? Tu veux y aller ?
– Pas forcément, mais je pensais à nos vacances là-bas.
– Des rapaces ? Non, je crois pas en avoir vu là-bas.
– Non, nos VACANCES !
– Mais on est pas en vacances, là.
– Ah laisse tomber, on parlera quand on sera arrêtés.
– J’espère bien, qu’on va pas se faire arrêter !
– … »

Le stress

Et tout ça, ça peut être stressant ! Très stressant, même. Chacune des conversations et situations ci-dessus est à même de faire exploser le stressomètre de toute personne normalement constituée.

Quand on conduit, on se retrouve isolé parce que toute conversation nous distrait de notre conduite et met tout le monde en danger, et quand on est passager, on se retrouve isolé aussi (mais moins quand même), parce que c’est difficile de suivre une conversation. Mais si on était juste isolé, va encore !

Le truc, c’est que tout ce qui se passe autour de nous attire notre attention. Par exemple, une conversation entre passagers peut être la source d’éclats de voix qui nous demanderont un effort d’identification. Ou bien, on aura l’impression qu’on nous parle quand ce n’est pas le cas. Du coup, on a tendance à être constamment sur le qui-vive. Comme on a du mal à comprendre et à interpréter ce qui se passe, un cri ou un rire d’enfant à l’arrière nous fait le même effet que si notre compagnon ou compagne du côté passager venait de crier « Attention ! »

Et puis, un rien peut nous faire sursauter. J’ai remarqué que je me sens souvent plus sereine quand je suis seule dans la voiture que quand nous sommes plusieurs. Parce qu’il y a moins de bruit, et surtout pas de bruit provenant de sources que je ne contrôle pas. Donc peu de choses peuvent me surprendre, provenant de l’intérieur de l’habitacle, du moins. Et je peux me concentrer entièrement sur la route et sur ce qui se passe en dehors de la voiture. Un long trajet en voiture est bien plus fatigant pour moi si nous sommes plusieurs dans la voiture que si je suis seule, surtout si c’est moi qui conduit.

Comment faire ?

Heureusement, tous ces défis peuvent être relevés.

Etablir des règles

C’est une des premières choses à faire : parler aux autres passagers de la voiture et mettre les choses au points.

Si vous êtes dans ce cas-là, alors il est important que vous expliquiez aux autres ce dont vous avez besoin.

Il peut s’agir de choses simples comme :

  • Si on met de la musique, on ne parle pas. On arrête la musique (ou on diminue fortement le volume) AVANT de parler.
  • Pas d’éclats de voix ou de cris dans la voiture
  • Eviter les jeux vidéos qui font du bruit ou autres sources sonores qui peuvent faire peur (Ne pas écouter Carmina Burana au volant non plus…)
  • Attirer l’attention de la personne malentendante (en la touchant par exemple) avant de lui parler, surtout si elle est au volant (allez-y doucement pour ne pas la faire sursauter non plus)

Il peut y avoir d’autres règles à mettre en place, c’est à chaque personne de déterminer ce qui est le plus important pour elle. L’idée, ce n’est pas d’instaurer un système rigide où aucune spontanéité n’est possible, mais de rendre l’environnement de la voiture le moins stressant possible pour la personne malentendante.

Si vous faites du co-voiturage, il peut être intéressant (et important) de prévenir vos passagers (et/ou votre conducteur) de votre perte auditive, et d’expliquer ce qu’elle implique pour vous lors d’un trajet en voiture.

La technologie

La technologie peut aussi aider à rendre les trajets en voiture moins pénibles.

Par exemple, vous aurez peut-être la possibilité de régler un programme Voiture sur vos appareils auditifs. Je l’ai fait récemment, et il s’agit d’un programme qui, au lieu de concentrer l’action des micros vers l’avant lorsqu’il y a du bruit, garde les micros ouverts vers l’avant et vers l’arrière, et s’adapte suivant si les sons proviennent de l’arrière, de l’avant ou des deux en même temps. Le confort d’écoute est bien amélioré grâce à ce programme. Cela n’est pas parfait, bien sûr, mais c’est mieux.

Une autre possibilité, en particulier si vous êtes avec une seule autre personne dans la voiture, c’est d’utiliser un système de micro déporté (comme le Conviveo de Tinteo ou même le Teo Duo que j’avais testé dans cette configuration avec un micro cravate). Ce système permet de concentrer le son de la voix de l’autre grâce à un micro, permettant ainsi une meilleure compréhension lors d’une conversation.

Bien sûr, rien de tout cela n’est parfait, mais c’est toujours mieux que rien !

Et vous, comment faites-vous en voiture ? Avez-vous trouvé des astuces qui fonctionnent bien pour vous ?

5 préjugés sur la perte auditive

Les préjugés sur la perte auditive

Ce n’est pas évident de comprendre ce qui ne nous est pas familier. Et, comme pour tout, un bon nombre de préjugés courent au sujet de la perte d’audition, et tant que vous y croyez, vous ne parviendrez pas à comprendre vos collègues ou proches malentendants. Voici de quoi tordre le cou à quelques unes de ces idées préconçues.

« Tu es appareillée, donc tu entends bien ! »

Si seulement ! Nombreux sont ceux qui sont persuadés que les appareils auditifs, c’est comme les lunettes : on les met et hop, on entend ! Malheureusement ce n’est pas le cas… (Je me rends bien compte que ce n’est pas toujours le cas pour les lunettes non plus, d’ailleurs, mais ces préjugés sont bien là).

Imaginons que, sur une phrase de 10 mots, j’en entende naturellement environ 4 sans appareils. C’est un exemple, bien sûr, parce qu’il arrive que j’en entende plus, tout comme il arrive que j’en entende moins. Pour suivre cet exemple, avec les appareils j’en entendrai peut-être 7. Il m’en restera donc toujours 3 à deviner. Ce qui peut donc prêter à de nombreux quiproquos et problèmes de compréhension.

Donc ne vous leurrez pas, si quelqu’un est malentendant et appareillé, ne vous attendez pas à ce qu’il comprenne tout ce qui est dit dans toutes les situations. Car il y a beaucoup de situations où, avec ou sans appareils, nous sommes en difficulté, comme les situations de groupe, les réunions professionnelles, et les situations bruyantes par exemple. Ou même si vous êtes en contrejour, si vous parlez très doucement sans nous regarder ou si vous vous cachez la bouche.

« Ah tu es malentendante ! J’aimerais bien apprendre la langue des signes aussi… »

Il y a plusieurs variantes pour ce point-là :

« Je connais aussi quelqu’un qui parle la LSF » ou « J’ai fait Signe avec bébé avec mon enfant » ou « Je connais un sourd qui parle en LSF, je pourrais vous mettre en contact ? »

C’est une idée préconçue qui associe nécessairement perte d’audition, ou surdité, à la langue des signes. Comme si ce n’était pas possible d’être sourd ou malentendant sans parler la langue des signes.

Il y a autant de surdités que de personnes sourdes ou malentendantes. Chacun a sa propre situation. Certains communiquent grâce à la langue des signes, d’autres parlent français. Pour ma part, je suis née entendante, j’ai perdu l’audition petit à petit mais ma culture est toujours une culture orale, et je ne parle pas la langue des signes (pour l’instant en tout cas). Et je ne suis pas la seule à être dans ce cas. Pour d’autres personnes, c’est la langue des signes qui est à l’origine de leur épanouissement.

Si vous ne savez pas si une personne sourde ou malentendante communique le mieux à l’oral, en LSF ou par écrit, demandez-lui ou trouvez un moyen de le savoir, en parlant avec ses proches par exemple, plutôt que de présumer qu’elle parle forcément la langue des signes, puisqu’elle n’entend pas ou pas bien.

« Vraiment, tu es malentendante ? Mais pourtant cela ne s’entend pas ! »

Pourquoi est-ce que cela devrait s’entendre ?

Là encore, la diversité des surdités est flagrante. Certaines personnes naissent sourdes ou malentendantes, et ont besoin de l’aide d’un orthophoniste pour apprendre à parler. Vu que l’apprentissage de la langue se fait moins par l’audition que par le toucher, le son de la voix peut être différente. Mais cela n’est pas toujours flagrant, malgré tout.

Et pour les milliers de personnes qui, comme moi, ont perdu l’audition plus tard dans leur vie, cela ne s’applique pas. Alors non, cela ne s’entend pas et c’est aussi pour cela que les gens oublient si facilement que j’entends mal, et ne font plus attention à me parler en face, assez fort et distinctement. Mon handicap ne s’entend pas et ne se voit pas. Alors il faut que j’en parle si je veux avoir une chance de suivre les conversations.

« Tu es malentendante et tu écoutes/joues de la musique ? »

Eh bien oui, et pourquoi pas ?

Personnellement, j’ai commencé la musique bien avant de perdre l’audition. J’ai donc eu le temps de devenir une musicienne accomplie, jusqu’à ce que ma perte auditive me fasse perdre beaucoup de mes repères au niveau musical. Petit à petit, c’est devenu impossible de reconnaître une chanson ou un morceau de musique, d’en distinguer la mélodie ou encore les paroles. Je n’arrivais même plus à savoir si la chanson était en français ou en anglais !

Mais ça, c’est mon histoire. Et j’apprécie malgré tout beaucoup la musique, que j’écoute de préférence au casque pour en saisir le maximum de subtilités, et à petite dose pour ne pas fatiguer mes oreilles. J’ai même commencé à faire de la basse quand je me suis rendu compte que j’en entendais et que j’en aimais beaucoup la sonorité. Ce n’est pas toujours évident de retrouver des repères dans les lignes mélodiques et harmoniques qui ont été modifiées par ma perte auditive (heureusement, le rythme est un repère qui reste). Mais petit à petit, j’apprends à réentendre la musique, et à trouver de nouveaux repères qui me permettent d’avoir du plaisir à écouter et à jouer de la musique.

Et au-delà de mon histoire, il y a beaucoup de personnes malentendantes ou sourdes qui sont musiciennes, et très bonnes musiciennes avec ça. Voyez Evelyn Glennie par exemple !

« Tu as perdu de l’audition ? Mais tu es jeune ! »

C’est aussi un de ces  préjugés qui pousse les gens à penser que l’on ne perd l’audition qu’à partir d’un certain âge. La conséquence directe de cette fausse idée est la suivante : autant on pensera à une perte auditive quand on rencontrera une personne âgée qui semble avoir des problèmes de compréhension, autant on y pensera pas si la personne est plus jeune.

Imaginez la situation. Vous parlez à une personne d’une trentaine d’années, et elle vous fait répéter plusieurs fois ce que vous dites, pour finir par répondre à côté. Sa voix est « normale », dans le sens où elle n’a pas d’accent, et pas de problèmes d’élocution. Aucun handicap n’est visible, et ce n’est sûrement pas ce à quoi vous pensez en premier. Alors, à quoi pensez-vous ? Soit la personne est étrangère (mais elle n’a pas d’accent donc cela ne sera peut-être pas non plus votre premier réflexe), soit elle est stupide, soit elle essaie de vous faire enrager ? Peu de personnes penseraient, dans ce cas-là, que cet individu a peut-être tout simplement des difficultés d’audition.

C’est une situation qui m’est déjà arrivée, et si je ne pense pas à prévenir les gens que je suis malentendante, je vois bien le regard interloqué de la personne qui ne comprend pas ma réponse et ne parvient pas à comprendre pourquoi je réponds à côté. Et cette situation est sans aucun doute due au fait que je sois (relativement encore) jeune, et que mon handicap ne se voie pas et ne s’entende pas. Si je repère ce regard, j’explique vite que je suis malentendante, et je sens le soulagement ressenti par l’interlocuteur. Ah d’accord ! Tout s’explique !

La perte auditive et la surdité touche des enfants, des adolescents, des adultes et des personnes âgées. Il est vrai que la presbyacousie, avec sa perte caractéristique des fréquences aiguës, touche plus souvent les personnes vieillissantes, mais il peut y avoir tout un tas d’autres raisons pour une perte auditive : congénitale, génétique, suite à un accident, un virus mal soigné, une prise de médicament, ou suite à des nuisances sonores au travail par exemple.

 

Et il s’agit là seulement des cinq premiers préjugés que j’ai trouvés. Je partagerai prochainement cinq autres idées préconçues qui ont un impact négatif sur votre compréhension de la perte auditive.

 

 

Les aides auditives – miracle ou enfer ?

ensemble d'aides auditives

J’ai eu rendez-vous avec un nouvel ORL fin janvier. Cela faisait un peu plus d’un an que je n’avais pas fait d’audiogramme, et les résultats étaient très surprenants pour moi. En effet, je n’avais pas perdu d’audition, c’est à dire que j’entendais toujours les bips de différentes fréquences à peu près pareil. Par contre, j’avais perdu de la compréhension, et j’étais capable de répéter moins de mots qu’avant à un volume équivalent.

L’ORL m’a expliqué qu’il y a une raison très simple à cette perte de compréhension : mon cerveau n’est pas assez stimulé. Et la cause, c’est mes appareils auditifs. Il y a trois raisons potentielles à cela, m’a-t-il dit. Soit je ne les mets pas assez (ce qui ne devrait pas être le cas), soit ils sont mal réglés, soit ils sont trop vieux. Etant donné qu’ils n’ont que trois ans, j’ai espéré que la deuxième raison pourrait être la bonne.

Et en effet ! Après avoir vu mon audioprothésiste, je me suis rendu compte que mes appareils n’avaient jamais été réglés au bon volume. Et en effet, au moment où j’ai obtenu ces appareils, il y a trois ans, mon cerveau n’était pas capable de supporter le volume qui aurait correspondu à ma perte auditive réelle. Mais j’aurais dû retourner voir mon audioprothésiste, pour augmenter petit à petit les réglages, ce que je n’ai pas fait. Bien sûr, maintenant que je le sais, je peux faire augmenter les réglages, et je devrais récupérer ma compréhension, grâce à la plasticité cérébrale (merveilleux attribut du cerveau humain !!).

Je me suis alors rendu compte à quel point ces appareils sont importants. Et aussi pourquoi il est important de se faire appareiller aussi tôt que possible, et de faire régler les appareils régulièrement pour garder autant de compréhension que possible.

Mais les aides auditives ne sont pas toujours une évidence, et pour de nombreux malentendants, la visite chez l’audioprothésiste est une corvée à retarder ou même à éviter.

L’enfer des aides auditives

Déjà, les appareils auditifs sont souvent hors de prix. Il faut compter au moins 1000 € par appareil, et un appareillage complet (des deux oreilles) peut facilement coûter 3000 ou 4000 €. En France, la sécurité sociale rembourse les appareils auditifs à hauteur de 60 %, sur la base d’un tarif fixé à 199,71 euros, quelle que soit la classe de l’appareil prescrit. Ca, c’est si on a plus de 20 ans. Pour les moins de 20 ans, ou si l’on souffre de cécité aussi, le remboursement est meilleur, mais souvent bien inférieur à ce que l’on paie malgré tout. Et les mutuelles fournissent rarement le complément, à moins de payer une fortune mensuellement (autant mettre de l’argent de côté pour les appareils, quoi).

Bien sûr, on peu avoir des aides financières de la MDPH, par exemple, mais il faut souvent compter entre 9 mois et un an pour que la MDPH accorde un financement. Lors d’un remplacement d’appareils, par exemple, si les anciens appareils sont tombés en panne, qui peut attendre un an (ou même 9 mois) avant d’en avoir de nouveaux ? Et risquer de rester isolé pendant tout ce temps, sans aide à la communication ?

Et puis, une fois qu’on a finalement réussi à obtenir un appareillage, eh bien c’est rarement parfait. Cela prend du temps et de nombreuses visites chez l’audioprothésiste pour arriver à un réglage satisfaisant, et il y aura toujours des situations difficiles. J’ai appris, au fil des années, que l’appareillage ne permet pas de faire comme si on entendait bien. La technologie ne remplace pas une audition naturelle (pour l’instant en tout cas), et il y aura toujours des moments où nous serons perdus, où nous interviendrons à tort dans une conversation, où nous devrons faire répéter plus que quelqu’un d’autre. L’appareillage ne permet donc pas de camoufler parfaitement le handicap.

De nombreuses personnes refusent d’être appareillées parce qu’il s’agit d’une stigmatisation, parce que cela les identifie comme étant malentendants. De même pour toutes les autres aides à l’audition, les micros déportés, les casques amplificateurs : nombreux sont les salariés qui refusent de les utiliser, au travail, par peur d’être différents.

Et puis, tous ces appareils, il faut apprendre à les utiliser. Et la courbe d’apprentissage n’est pas toujours évidente ! En conséquence, nombreux sont les appareils qui ne sont pas utilisés au maximum de leurs capacités, ou qui sont mal utilisés. Cela n’est pas évident de se retrouver devant un ou plusieurs objets technologiques, et de se rappeler de comment utiliser chacun de ces objets au mieux. Moi, j’ai pendant longtemps oublié d’utiliser la télécommande qui me permet de régler le volume et les aigus de mes appareils. Pourtant, elle est très utile !

La télécommande de mes appareils auditifs

Le miracle des aides auditives

D’un autre côté, la technologie progresse de plus en plus. Les appareils auditifs proposent maintenant des programmes automatiques qui ajustent les micros suivant la situation détectée. Les micros deviennent unidirectionnels dans le bruit, quand la conversation se passe devant moi, et les micros arrières sont coupés pour me permettre de me concentrer sur ce qui est dit. Quand l’environnement est calme, les micros sont plus larges, et me permettent d’entendre les petits bruits partout. S’il y a trop de bruit, le son est géré de telle sorte que je ne sois pas gênée par un volume trop élevé. Mes appareils sont déjà très performants à ce niveau, et ils ont trois ans ! Je n’imagine même pas à quel point les nouveaux doivent avoir progressé.

Pour l’instant, le seul problème que j’ai, c’est avec le téléphone. Je n’ai pas encore trouvé de système qui me permette d’avoir une conversation téléphonique confortable. La plupart du temps, j’évite le téléphone ou je passe pas Skype. Mais je sais que de nombreux malentendants sont ravis de leurs systèmes téléphoniques par bluetooth ou par boucle magnétique, qui envoie le son du téléphone directement dans leurs appareils. Pour moi, je n’ai pas encore trouvé la technologie qui me convient, mais je ne perds pas espoir !

La technologie rend beaucoup de choses accessibles : la télévision, la musique, le cinéma, certaines conversations, etc. Sans aides auditives, je serais complètement isolées, et je ne ferais que lire ou regarder la télévision avec des sous-titres !

Et puis, les appareils permettent à mon cerveau de rester stimulé, comme je viens de l’apprendre. Cela m’assure une meilleure compréhension avec ET sans appareils, et cela permet d’éviter que mes acouphènes ne prennent le dessus (et rien que pour ça, c’est un bonheur !).

Comment choisir les aides auditives dont on a besoin

Il existe de nombreuses possibilités, depuis les prothèses auditives et les implants jusqu’aux casques TV et aux micros déportés, en passant par les outils domotiques qui permettent de transformer la sonnette, la sonnerie du téléphone ou le réveil en signaux vibrants ou visuels.

Du coup, il n’est pas toujours évident de savoir quoi choisir. Avec mes premiers appareils auditifs, j’avais acheté un système bluetooth qui connectait mes appareils à la télévision. Je ne m’en suis jamais servi, parce que le son n’était pas assez bon. On aurait pu croire que j’avais appris ma leçon, mais non ! J’ai fait la même erreur avec mon deuxième appareillage. Encore des accessoires dont je ne me suis jamais servie, pour la même raison ! J’avais bon espoir que la technologie ait fait assez de progrès pour m’apporter un meilleur confort auditif, mais le son par bluetooth n’est toujours pas assez bon pour moi, et je préfère utiliser directement un casque TV (en ôtant mes appareils), ou simplement mes appareils et des sous-titres.

Avec l’expérience, mon conseil est le suivant : choisissez des appareils auditifs qui sont compatibles avec des accessoires (micros déportés, colliers bluetooth, système téléphonique…), mais n’achetez pas tout dès le départ. Habituez-vous bien aux appareils (n’oubliez pas de les faire régler), puis observez les situations où vous avez encore des difficultés, et testez des accessoires pour voir s’ils peuvent résoudre des problèmes.

Je pense que c’est ce que je ferai lors de mon prochain appareillage. Parce que la base, cela reste les appareils auditifs.

Et puis, selon vos activités et votre mode de vie, vous aurez peut-être besoin de certains accessoires plus que d’autres. Regardez si vous pouvez trouver des accessoires versatiles, qui peuvent servir dans plusieurs situations, comme ceux de Tinteo, par exemple.

Et il y a aussi de nombreux malentendants qui s’en sortent sans aucune aide technologique, mais que voulez-vous, ça doit être mon côté geek… Je crois que je continuerai à suivre l’évolution de la technologie des aides auditives, pour voir jusqu’où mon confort auditif peut être amélioré. Et je vous tiendrai au courant de ce que je découvre !

A la pêche aux idées…

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Le début de cette semaine était brumeux. Un brouillard dense, blanchâtre et opaque, qui empêchait toute visibilité et rendait la respiration difficile.

Et tandis que je réfléchissais au thème à aborder cette semaine, dans ce blog, j’ai eu l’impression que le brouillard avait envahi jusqu’à mon cerveau. Mes méninges en surchauffe n’arrivaient à se fixer sur aucune idée pertinente. Et malgré les nombreuses possibilités (j’ai plusieurs listes !), aucun thème ne retenait mon attention.

Alors je me suis dit :

Il est peut-être temps sortir de mes idées, de m’ouvrir, et de vous demander à vous, mes lecteurs, ce que vous souhaitez lire !

Quels sont les thèmes que vous aimeriez que j’aborde ?

Quelles sont les difficultés que vous rencontrez ?

Connaissez-vous une personne sourde ou malentendante (ou autrement handicapée) qui vous inspire, et dont vous aimeriez que je parle ?

Un livre ou un film que vous aimeriez que je chronique ?

Une technologie que vous aimeriez que j’évoque ?

Une ou des émotions que vous devez affronter ?

Souhaitez-vous que je traite plus en profondeur un thème que j’ai déjà évoqué ?

C’est l’occasion de me faire passer vos suggestions, et de contribuer à mon blog !

Vous pouvez me répondre en commentant sur cet article, ou en m’envoyant un email sur ma page de contact. Je répondrai à toutes les suggestions autant que possible.

L’outil ultime du malentendant : le smartphone

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Quand on réfléchit aux outils qui peuvent aider un malentendant, on ne pense pas toujours aux objets courants, que tout le monde possède et utilise, ou presque. Et pourtant, le smartphone, ou téléphone intelligent, est un des outils que j’utilise au quotidien, et qui m’aide dans bien des situations en lien avec ma perte auditive.

De nombreuses raisons en font un compagnon de choix, qui ne me quitte jamais.

  • La « coolitude » de l’objet

Le smartphone est un des objets technologiques les plus répandus à l’heure actuelle. La plupart des personnes qui ont une vie sociale et professionnelle active en ont un.

Pouvoir l’utiliser pour faciliter la compréhension quand on est malentendant, c’est un des éléments qui nous projette de l’état de « personne handicapée avec prothèses auditives » à celui de « personne à la pointe du progrès technologique ».

Le côté jeune, actif, dans le vent, nous aide à nous intégrer dans un monde largement basé sur la technologie.

  • La magie de la communication écrite

La possibilité de recevoir un texto ou un email à la place d’un appel téléphonique rend la communication bien plus facile. Finis ces moments de sueur froide où je répond au téléphone et ne parviens pas à identifier la personne, ou l’organisme, qui m’appelle.

« Pourriez-vous m’envoyer un email s’il vous plaît ? J’entends très mal au téléphone. »

Et la plupart du temps, la communication arrive ainsi par écrit, le smartphone m’y donne un accès immédiat, et la compréhension du message est assurée sans effort de ma part.

Et ça, il faut bien le dire, c’est très reposant.

  • La qualité du son numérique

Les smartphones actuels de bonne qualité possèdent des composantes électroniques qui assurent un excellent son numérique.

Cela me permet de recevoir ou de passer un appel, alors qu’avec un téléphone fixe, cela n’est plus possible. Après, même avec le smartphone, il faut certaines conditions pour que je puisse comprendre une personne au téléphone, et il s’agit presque toujours de conversations courtes, avec un objectif pratique.

La période où je passais des heures au téléphone avec famille et amis, à parler de tout et de rien, est maintenant bel et bien révolue. Mais heureusement, il reste toujours d’autres moyens de communication (Dieu merci, Skype existe !).

  • L’accès à la musique (avec un bon casque)

Grâce au son numérique, j’arrive même à écouter un peu de musique ! Il me faut un bon casque, bien sûr, mais une fois le casque adéquat trouvé, le son du smartphone est assez clair pour m’aider à saisir une partie de la richesse sonore de certaines musiques.

Bien mieux que le son de ma chaîne hifi, ou le son des haut-parleurs de la voiture ou de l’ordinateur, en tout cas.

  • Et bientôt : La possibilité d’avoir des appels transcrits par écrit

Les smartphones deviennent de plus en plus pertinents pour les personnes malentendantes, grâce à la myriade d’applications que l’on peut installer dessus.

La preuve : Un entrepreneur sourd est en train de développer une application qui pourra transcrire « instantanément sur votre smartphone les propos de votre interlocuteur pendant qu’il parle. »

La technologie de transcription de la voix a beaucoup progressé ces dernières années, et une application de ce genre permettra à de nombreux malentendants de pouvoir recommencer à téléphoner sans crainte.

Je l’attends moi-même avec beaucoup d’impatience !

  • Et déjà : une télécommande pour les appareils auditifs

Depuis peu, certains appareils auditifs sont compatibles avec un smartphone. Un utilisateur a d’ailleurs détaillé les fonctionnalités de ses aides auditives qui sont couplées avec son iphone.

Bien sûr, cela ne concerne pas toutes les prothèses auditives, ni même tous les smartphones pour l’instant. Apple a été le premier à rendre son iphone compatible. Mais des applications sont en cours de développement pour les autres plateformes mobiles, et l’année 2015 devrait apporter de grandes avancées à ce sujet.

Mais pourquoi faire, me demanderez-vous peut-être ? Pourquoi coupler des aides auditives avec un smartphone ? N’est-ce pas un gadget inutile ?

Eh bien, j’ai toujours eu une télécommande avec mes appareils, depuis mon premier appareillage en 2009. Cette télécommande peut être utilisée pour augmenter ou diminuer le volume, pour augmenter ou diminuer les aigus, ou pour changer de programme.

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Voici à quoi ressemble ma télécommande actuelle.

La télécommande améliore-t-elle le confort auditif ? Sans aucun doute. Mais je ne m’en sers quasiment jamais.

Pourquoi ? Je n’y pense pas. Les appareils sont dans mes oreilles et je les y oublie volontiers. Du coup, la plupart du temps, je n’ai pas le réflexe télécommande, parce que je ne pense ni à mes appareils, ni à ma perte d’audition.

Et puis, c’est voyant, de sortir une télécommande étrange de son sac pour subitement pianoter dessus. Ma télécommande actuelle émet des lumières bleues et rouges à chaque fois que je modifie un réglage, autant dire que ce n’est pas très discret.

Pianoter sur un smartphone, par contre, tout le monde le fait constamment.

Or, les appareils auditifs compatibles proposent une application à télécharger sur le téléphone, qui remplace la télécommande peu pratique des fabricants d’aides auditives. Depuis l’interface de l’application, on peut changer le volume, les aigus, les programmes, et bien d’autres fonctions encore.

  • Et même : un micro déporté à moindre coût !

Ca, c’est la cerise sur le gâteau ! Le smartphone peut devenir un micro déporté, lorsqu’il est couplé avec les appareils auditifs.

Concrètement, cela signifie que le micro du smartphone peut être utilisé pour saisir les paroles d’une personne ou d’un groupe de personne, et le son est retransmis directement dans les appareils auditifs.

En gros, au lieu de se pencher vers ses interlocuteurs, on leur passe le téléphone, et voilà ! Cela permet une amélioration non négligeable de la qualité d’écoute.

Je m’étais renseignée, il y a quelques années, sur les coûts associés aux systèmes de micros déportés, compatibles avec les aides auditives. Ils se chiffraient en milliers d’euros.

Et là, avec un smartphone à 500 euros, on a une technologie similaire qui, même si elle n’atteint peut-être pas le niveau de qualité des micros spécialisés, est accessible à bien plus de malentendants, et peut contribuer grandement à un meilleur confort d’écoute.

Une chose est sûre, mes prochains appareils auditifs seront connectés !

Les outils qui aident : les appareils auditifs

appareils auditifs

 

Quand on perd l’audition, on trouve de nombreuses façons de s’adapter. On regarde plus. On devient plus sensible aux émotions. On observe les autres, les situations et les lieux bien plus qu’avant. On s’appuie sur les autres sens pour compenser le handicap. Et il arrive que l’on s’appuie tellement sur ses capacités qu’on en arrive à oublier qu’il existe des technologies qui peuvent nous aider, au quotidien, à mieux entendre et à mieux communiquer. Parmi les quelques outils que j’utilise au quotidien, les appareils auditifs viennent en première place.

Et les prothèses auditives, c’est toute une histoire ! Une histoire très personnelle pour chaque malentendant. Il s’agit là d’une étape décisive à franchir dans l’acceptation de sa perte auditive. Ce n’est pas évident de passer du stade « Je n’entends pas bien, pouvez-vous répéter ? » (ou même « Je fais comme si j’avais entendu, tout va bien ») à « Je suis malentendant et je suis appareillé. »

Or, il est important de se faire appareiller assez tôt. Pourquoi ? Même avec une surdité légère, le cerveau perd l’habitude de percevoir certains sons. Plus on attend, plus la perte auditive est sévère au moment de l’appareillage, et plus difficile (et long) sera le temps d’adaptation, car le cerveau doit se réhabituer à percevoir ces sons, et doit souvent réapprendre à les identifier !

Mais quel que soit le moment où vous franchissez finalement le cap, il est important de suivre certaines règles pour que tout se passe pour le mieux :

– D’abord, obtenez l’aide d’un professionnel. N’essayez pas d’acheter des appareils auditifs à 200 € ou moins sur Amazon ! Cela ne vous aidera pas beaucoup. En effet, votre surdité est unique : vous entendez moins certaines fréquences que d’autres, et le fait d’augmenter simplement le volume pour tous les sons, et toutes les fréquences, ne vous donnera pas le confort d’écoute que vous recherchez, et cela risque au contraire d’endommager un peu plus votre audition ! Un audioprothésiste saura vous conseiller, et surtout pourra régler les appareils de façon à compenser votre perte auditive particulière.

– Si vous aviez essayé des appareils il y a plusieurs années, et que cela ne vous avait pas convenu pour une raison ou pour une autre, réessayez ! La technologie a vraiment fait un bond depuis quelques années, et les problèmes qui existaient il y a 10 ans, 5 ans ou même 2 ans pourraient bien avoir disparu. Allez voir un autre audioprothésiste, peut-être, d’autant plus si ça ne s’était pas très bien passé la dernière fois. Choisissez quelqu’un qui se trouve assez près de chez vous, parce que vous lui rendrez visite très régulièrement pendant la phase de réglage des appareils, privilégiez un professionnel avec qui vous vous sentez en confiance, et demandez un essayage gratuit !

– Rappelez-vous que ce n’est pas magique. Si vous venez de sortir de chez l’audioprothésiste et que tout est trop fort, que certains sons vous gênent ou que vos appareils sifflent, ne vous inquiétez pas ! Ne jetez pas vos appareils au fond d’un tiroir pour autant. Votre cerveau doit se réhabituer au niveau sonore normal, et doit recommencer à faire le tri entre les informations sonores qu’il n’avait plus l’habitude de gérer à ce volume. Il est même possible que vous deviez réapprendre à identifier certain bruits ou sons, ainsi que leur provenance. Cela prend un peu de temps. Si au bout de quelques jours, l’écoute est toujours inconfortable, retournez voir votre audioprothésiste et apportez-lui le maximum d’indications précises sur ce qui vous gêne (« J’ai du mal avec le bruit des talons dans la rue », « je ne supporte pas quand quelqu’un siffle », etc.). De cette façon, il pourra affiner le réglage de vos appareils. Cette phase de mise au point peut durer plusieurs semaines, soyez donc patient !

– Si vous avez une surdité des deux oreilles (pour autant que chaque oreille entende au moins un peu), et même si une oreille entend mieux que l’autre, faites appareiller les deux oreilles autant que possible. Cela permet un équilibre sonore au niveau du cerveau, et le temps d’adaptation sera d’autant plus court et moins difficile si vous n’avez pas à vous battre contre une perception déséquilibrée entre les deux oreilles. Vous trouverez plus d’informations sur ce sujet ici.

Il est important de savoir que les prothèses auditives ne sont pas l’instrument merveilleux qui résoudra absolument tous vos problèmes d’audition dans toutes les situations et qui vous permettra de faire comme si vous entendiez parfaitement bien en premier lieu. Malheureusement, ce n’est pas le cas. Lorsque j’ai eu mes premiers appareils, j’ai rêvé que cela me permettrait de ne pas avoir à divulguer mon handicap (cette « faiblesse »). Tout comme une personne myope qui porte des lentilles n’a pas besoin d’en parler, je pensais pouvoir être dispensée des longues explications embarrassantes pour justifier un quiproquo ou une incompréhension. J’ai été très déçue de me rendre compte que, dans un environnement bruyant, je ne comprends toujours pas tout, et que je décroche rapidement des conversations de groupe malgré l’appareillage.

Et j’ai dû apprendre à en parler. Expliquer aux gens qui m’entourent et que je rencontre que je n’entends pas bien, et que s’ils me parlent en cachant leur bouche, ou en me tournant le dos, ou en étant à l’autre bout de la pièce, ou s’il y a beaucoup de bruit, je ne les comprendrai pas, même avec mes prothèses auditives. Et au fur et à mesure que j’assume mieux ma perte auditive, je me rends compte que je dois quand même beaucoup à mes appareils. Certaines conversations me sont maintenant accessibles, et même si la situation est difficile à cause du vacarme environnant, ce sont des conversations dont j’aurais été exclues dès le départ avant d’être appareillée. Les conversations en tête à tête sont aussi bien plus confortables. Plus besoin de tendre l’oreille et de faire un effort de concentration aussi intense pour comprendre mon interlocuteur. Pour moi, les appareils représentent le confort auditif que je ne pourrais pas avoir sans. Et à chaque fois qu’il est temps d’en changer, la technologie a tellement évolué qu’elle me permet un confort encore plus important, même si ma perte auditive s’est accentuée. 

Alors j’apprends à vivre avec, avec le rituel de les sortir de leur petit boîtier chauffant le matin, et de les y remettre le soir, qui est devenu presque aussi automatique que le brossage de dent quotidien. Et je suis très reconnaissante que ces petits objets puissent avoir un si grand impact dans ma vie, même s’ils ne « corrigent » pas ma perte auditive.

Et vous ? Êtes-vous appareillé ? Comment avez-vous fait, et vécu, le choix de porter des prothèses auditives ou non ? Quelle est votre relation avec vos appareils ? Et si vous avez un ou des malentendants, appareillés ou non, dans votre entourage, comment voyez-vous cette aide technologique ? Êtes-vous conscient que l’appareillage ne résout pas tous les problèmes d’audition ? Avez-vous déjà conseillé à des proches de se faire appareiller ? N’hésitez pas à commenter pour partager votre expérience !

Perte d’audition : les cinq étapes après le diagnostic

Dépression

Vous venez de faire un test auditif, chez l’ORL, lors d’une visite de médecine du travail ou chez un audioprothésiste, et le diagnostic tombe. Votre audition est moins bonne qu’avant. Bien moins bonne, peut-être même. Vous avez peut-être perdu 15%, 30%, ou 50% de votre capacité auditive. Ou plus. On vous conseille peut-être aussi de vous faire appareiller.

A ce moment-là, et même si vous vous y attendiez plus ou moins, la nouvelle vous tombe dessus comme une mousson en pleine saison sèche. Et vous restez là, sous le choc. Votre réaction est en fait tout à fait normale. Il s’agit là de la première étape d’un deuil. Parce que le diagnostic d’une perte d’audition, comme toute perte significative, entame un processus de deuil chez la personne concernée, avec cinq phases que l’on va devoir traverser. Ces cinq phases avaient déjà été mises en évidence par Elisabeth Kübler-Ross en 1969.

  • Le déni

La première phase commence quand vous êtes cloué sur le fauteuil en face du professionnel qui vient de vous faire part de son diagnostic. C’est le choc, qui sera rapidement suivi du déni. Chez moi, cette phase a duré plusieurs années. La phase du « Moi? Avoir un handicap ? Pas moyen ! »

« Qui, moi ? Sourd ? Malentendant ? Non, non… C’est juste que tu parles pas assez fort, ou qu’il y a trop de bruit, ou que tu mâches tes mots. »

« Moi ? J’écoute la télé plus fort qu’avant ? Mais pas du tout ! J’ai toujours écouté à ce volume. J’aime bien que le son m’enveloppe. »

« Comment ça, tu trouves que je fais répéter ? Tu n’as qu’à mieux me parler ! »

Et autres excuses du même genre. Tant que l’on est coincé dans cette phase, on n’entendra ni les conseils, ni les mises en garde de nos proches, et on pensera que les professionnels sont incompétents ou ont commis une erreur plutôt que de les croire. De plus, le handicap auditif reste invisible, et c’est assez facile de le cacher à grand renfort de bluff et autres techniques de dissimulation. Il est donc plutôt facile de rester longtemps coincé à ce stade. Et puis, un jour, on se rend compte que si, si, il y a un problème. Et on passe à une étape suivante.

  • La colère

La colère est souvent dirigée vers l’injustice de la situation. Cette phase de colère est peut-être proportionnelle à l’âge auquel on reçoit le diagnostic. Plus on est jeune, plus on va être en colère.

« Pourquoi moi ? Pourquoi maintenant ? »

Cette colère peut être dirigée vers Dieu, l’Univers, le destin, la fatalité, la vie (appelez cela comme vous voulez) ou vers celui, celle ou ceux que nous tenons pour responsable(s) de la situation. Et c’est vrai, la situation est injuste ! Certaines personnes écoutent de la musique fort tous les jours de leur vie et gardent une audition intacte, alors que moi, qui ai toujours protégé mon audition avec des bouchons d’oreilles dans les situations bruyantes, et qui ai toujours écouté de la musique au minimum (et jamais longtemps d’affilée), je perds l’audition, et je n’y peux rien. Grâce à la colère, j’ai eu l’impression d’entrer dans le vif des émotions et des enjeux du handicap. Pendant l’étape précédente, j’étais restée très indifférente. Et là, tout d’un coup, les choses commençaient à bouger.

  • Le marchandage

La phase de marchandage, pour moi, c’était un peu du déni encore. On se rend compte qu’il faut bien accepter cette perte auditive, on est bien conscient de son impact au quotidien. Oui, mais…

« Bon d’accord, j’entends moins bien, mais si je mets des appareils tout sera comme avant. »

« Oui, j’entends pas bien, mais peut-être qu’en restant positif, ça va s’arranger… »

« Peut-être que j’entends pas bien parce que je suis stressé, et si je fais de la relaxation (du yoga, de la méditation, de la sophrologie, etc…), ça va aller mieux… »

Cette phase est remplie de déceptions, à chaque fois qu’un espoir retombe.

  • La dépression

Là, on arrive au coeur du deuil. On arrive à la tristesse. Et cette tristesse peut être assez profonde pour se transformer en un puits de désespoir, qui peut s’éterniser. C’est là que l’on ressent vraiment jusqu’où la perte d’audition nous touche. C’est un moment où on va avoir tendance à s’isoler, parce que « à quoi bon ? » On s’imagine déjà vieillir seul, loin de tous ces gens que l’on ne comprend plus. On s’imagine que personne n’aura le courage ni l’envie de continuer à essayer de communiquer avec nous, et de toute façon on imagine déjà qu’on va devenir complètement sourd, et qu’on devra passer la fin de sa vie dans le silence, dans un monde où aucune musique ni aucun rire de bébé ne viendra nous émouvoir. On pense à la langue des signes, comme ultime recours pour continuer à communiquer, et puis on se rend compte que personne autour de nous ne la parle, et on se sent déjà exclus de son environnement proche.

Cette étape est difficile. C’est un moment où il peut être utile, voire nécessaire d’aller chercher de l’aide. De nombreuses associations proposent un suivi psychologique gratuit (financé par la MDPH en général) pour les sourds et malentendants. En Poitou-Charente, par exemple, il existe une excellente association, Diapasom, qui propose un accompagnement de ce genre, que je ne peux que recommander chaudement. Être écouté sans jugement, régulièrement, et pouvoir partager ses doutes, ses peurs, mais aussi ses petites victoires, c’est vraiment quelque chose de précieux, qui peut aider à avancer vers la dernière étape du processus.

  • L’acceptation

Enfin, on accepte. « Bon, d’accord, je suis malentendant(e). Qu’est-ce que je vais bien pouvoir faire de ça maintenant ? »

A ce stade-là, j’ai découvert plusieurs choses. D’abord, je me suis rendu compte que je pouvais toujours non seulement écouter de la musique, mais aussi en faire ! Pour la musicienne que je suis, cela a été un immense soulagement. Alors bien sûr, j’ai dû m’adapter. J’ai quasiment arrêté de faire du piano, qui était mon premier instrument et ma base, parce que je n’arrive plus à distinguer les notes aigües les unes des autres. Mais je me suis mise à la basse. Et là, énorme coup de coeur. Et puis, en apprenant à jouer avec d’autres, et à faire attention, à me concentrer davantage sur la musique que je fais, eh bien, j’ai l’impression que j’arrive mieux à entendre la musique.

Ensuite, j’ai découvert qu’en acceptant ma perte d’audition, j’arrivais mieux à l’assumer. Concrètement, cela signifie que j’arrive mieux à en parler aux gens, y compris (et surtout) à ceux que je viens de rencontrer. Et du coup, eh bien, la communication se passe mieux. J’hésite moins à dire que je n’ai pas compris, et à demander aux gens de répéter. Je ne parviens pas à le faire à chaque fois, bien sûr, mais c’est mieux. Et même dans les soirées ou situations bruyantes où j’aurais entièrement abandonné toute velléité de parler à qui que ce soit, le fait d’avoir un ou deux échanges significatifs avec des personnes me permet de me sentir bien. Je sens que j’ai ma place, là. Et qu’en fait, ça ne va pas si mal.

Les trois étapes centrales du processus de deuil, d’après mon expérience, peuvent aussi arriver dans un ordre différent. Une fois le déni passé, on peut tomber dans une tristesse profonde, par exemple, puis sortir de la tristesse pour entrer dans une phase de colère, et terminer par le marchandage. Il est aussi possible que ces phases reviennent de façon aléatoire, au gré de l’évolution du handicap, ou des rappels qu’il est toujours bien là, et bien handicapant. Parce que la différence fondamentale entre la découverte du handicap et le départ ou le décès d’une personne, c’est que, comme le souligne la psychologue Isabelle Ansieau, « contrairement au deuil d’une personne qui disparaît, le handicap lui, ne disparaît jamais. »

Ces étapes reviennent donc périodiquement. La découverte, au cours d’un nouvel audiogramme, que l’on a encore perdu quelques miettes d’audition, peut être le début d’une nouvelle phase de colère, ou de tristesse. Je sais que ces émotions reviendront, même si en ce moment ça va plutôt bien. Je fais simplement tout mon possible pour ne pas m’enfermer trop longtemps dans la colère, la tristesse ou le marchandage, et pour chercher l’aide dont j’ai besoin pour accepter ce qui est, et pour continuer à me construire avec l’audition que j’ai.

Et vous ? Quelle a été votre expérience de ce processus de deuil après l’annonce de votre perte auditive ? Avez-vous eu du mal à finalement accepter la situation ?

Avez-vous été proche d’un malentendant au moment de son diagnostic ? Comment avez-vous vécu les moments suivant la découverte du handicap ?